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Syndicalisme

Au 24e congrès de Force ouvrière, Jean-Claude Mailly s'apprête à passer la main

Seul candidat à la succession de Jean-Claude Mailly, Pascal Pavageau se montre prêt à durcir le ton du troisième syndicat de France au cours des prochains mois.
Jean-Claude Mailly et son successeur désigné, Pascal Pavageau, en 2014 à Matignon. (Photo Bertrand Guay. AFP)
publié le 23 avril 2018 à 7h42

Cinq jours, un nouveau secrétaire général à élire et beaucoup de sujets à débattre. Le Congrès de Force ouvrière (FO) qui s'ouvre ce lundi, à Lille, s'annonce dense et mouvementé. Sans surprise, il devrait se conclure vendredi par l'élection de Pascal Pavageau (lire son portrait) à la tête du troisième syndicat français. Seul candidat en lice, cet ingénieur d'Etat de 49 ans succèdera à Jean-Claude Mailly, qui achève son quatrième mandat. De quoi faciliter la passation de pouvoirs, mais n'empêchera pas ce rendez-vous syndical de connaître quelques remous. Et c'est Jean-Claude Mailly, le sortant, qui devrait être le plus bousculé par les militants, entre 3 000 et 4 000 attendus au Grand Palais de la ville. «Cela va être rock and roll !» reconnaît l'intéressé qui a vécu une année 2017 compliquée au sein du syndicat. En cause, notamment : sa position lors de la réforme du code du Travail par ordonnances à l'automne dernier.

Sous son impulsion, FO, qui avait pourtant fermement combattu le projet de loi El Khomri l'année précédente, s'est montré bien moins offensif contre le projet de loi de Muriel Pénicaud, la ministre du Travail. Jean-Claude Mailly a choisi de discuter avec le gouvernement, sans descendre dans la rue avec la CGT avec qui FO était pourtant bras dessus, bras dessous un an plus tôt. Une question de tactique et de pragmatisme, explique le syndicaliste. Mais ce revirement a secoué les rangs du syndicat, la base jugeant son attitude pas assez nerveuse. En interne, les divisions ont éclaté au grand jour. A tel point que le comité confédéral national du syndicat, sorte de parlement interne, lui a imposé une journée d'action, le 16 novembre 2017, signe d'un certain désaveu. Ce lundi, lorsqu'il présentera son rapport d'activités, certains devraient lui rappeler leur mécontentement. Ce rapport pourrait par ailleurs recueillir davantage d'absentions et de votes contre que lors des précédents congrès, anticipe Pascal Pavageau. Un mauvais moment à passer donc pour Mailly, avant de rejoindre le Comité économique et social européen (Cese), à Bruxelles, où il devrait par la suite «prendre un mandat» pour représenter FO.

«Convergence des luttes»

Pour Pascal Pavageau, en revanche, entre, d'un côté, un sortant décrié, et, de l'autre, la multiplication des conflits sociaux, le contexte est plutôt favorable. Se présentant comme «le candidat de la majorité», qui a su prendre la température sur le terrain et coller aux aspirations de la base, il assure être dans la ligne «historique de FO», reposant à la fois sur la négociation et la contestation. Mais il  laisse aussi entendre que le ton pourrait monter au cours des prochains mois. Pas question toutefois, pour l'heure, de répondre favorablement à la CGT qui appelle à un 1er mai unitaire : le futur numéro un de FO ne veut pas s'afficher avec un syndicat avant d'avoir pu rencontrer la totalité de ses homologues. Mais les mots «mouvement interprofessionnel» et «convergence des luttes» sont bien dans son logiciel actuel.

Encore peu connu du grand public, Pascal Pavageau ne sera pas la seule nouvelle tête de ce Congrès. Sur les 13 membres du bureau confédéral, six nouvelles personnes vont faire leur entrée, dont quatre femmes. Avec cette nouvelle équipe, rajeunie, il promet notamment de proposer du «constructif» et de lutter contre la «ringardidation» des syndicats. Mais aussi de «reprendre la main sur l'agenda social» car, dit-il, «on [les partenaires sociaux] n'a pas besoin de Jupiter pour définir les sujets sur lesquels on veut discuter». Une vision qu'il développera vendredi, lors de son discours de clôture du Congrès.