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Air France-KLM : débarquement immédiat pour le PDG

Jean-Marc Janaillac a annoncé sa démission, vendredi, après que 55,44% des salariés ont rejeté son projet d’accord. Outre les pilotes, le personnel au sol d’Air France a également exprimé son désaveu du dirigeant après plusieurs années de gel des salaires.
Le PDG d’Air France-KLM, Jean-Marc Janaillac, sur le point d’annoncer sa démission, vendredi à Paris. (Photo Geoffroy Van Der Hasselt. AFP)
publié le 4 mai 2018 à 20h56

«Je tire les conséquences de ce vote et je remettrai ma démission au conseil d'administration d'Air France…» Une déclaration solennelle et puis s'en va : ce vendredi 4 mai à 18 h 15, Jean-Marc Janaillac aura mis moins de cinq minutes à mettre fin à ses fonctions de PDG d'Air France-KLM. La conséquence logique d'une consultation qu'il avait lancée auprès des salariés dans l'espoir de mettre fin à la grève tournante qui perturbe la compagnie depuis deux mois. Las, le référendum a tourné au désaveu : 55,44 % des votants ont répondu «non» à la proposition d'augmentation salariale formulée par la direction. Or Janaillac s'était engagé à s'en aller en cas de vote négatif. Il s'est donc exécuté, non sans laisser transparaître un réel coup de blues : «C'est un immense gâchis qui ne peut que réjouir nos concurrents», a-t-il lâché.

Ce résultat est d'autant plus retentissant que 80,33 % des 46 771 salariés d'Air France ont pris part au vote. Visiblement, la direction de la compagnie n'avait pas du tout prévu une telle issue. Quinze minutes après l'annonce des résultats, un cadre dirigeant de la compagnie, interrogé par Libération, était sous le choc. «C'est incroyable et ça dénote d'un état d'esprit dans l'entre prise. Si Jean-Marc Janaillac n'avait pas été bon, je comprendrais. Mais il a fait le job pendant deux ans, signé des alliances, commencé le désendettement et dégagé de bons résultats.» Un conseil d'administration devrait se réunir mercredi pour désigner un PDG par intérim.

Les regards se tournent maintenant vers les pilotes, qui ont été les opposants les plus virulents au PDG. Philippe Evain, le président du Syndicat national des pilotes de lignes (SNPL) d'Air France, a néanmoins choisi de ne pas souffler sur les braises : «Nous ne voulions pas le départ de Jean-Marc Janaillac. Il a fait une erreur de jugement. Ce résultat signifie que les syndicats doivent être écoutés.»

Le verdict des salariés d’Air France montre en tout cas qu’au-delà des pilotes, qui mènent souvent le bal des revendications, les salariés au sol, numériquement plus nombreux, ont également voulu exprimer un ras-le-bol : leur fiche de paie fait du surplace depuis sept ans, alors que l’entreprise a renoué avec les bénéfices. Reste qu’Air France, bien que redevenue bénéficiaire, demeure bien moins rentable que ses principales concurrentes, British Airways et Lufthansa. Sans parler des compagnies low-cost telles Ryanair ou EasyJet, devenues de véritables «cash machines». D’où l’hésitation de la direction à être plus généreuse sur les augmentations.

Une période compliquée s’ouvre maintenant pour Air France. Il va d’abord falloir trouver un nouveau patron pour la compagnie. Or, compte tenu de l’état de l’entreprise et des difficultés qui s’annoncent, les talents ne vont pas forcément se bousculer. Autre problème : l’an passé, Air France a renforcé ses liens avec la compagnie américaine Delta et échangé un bout de capital avec Virgin Atlantic et China Eastern : autant d’associés qui risquent d’être tentés de prendre leurs distances. Dans l’immédiat, le directeur des ressources humaines, Gilles Gateau, fait partie des pressentis pour assurer l’intérim. Mais il faudra un vrai pilote dans l’avion, et vite.