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Libération

Marwan Muhammad sonde les musulmans de France

L’ancien directeur du Collectif contre l’islamophobie en France prend de court le gouvernement en lançant une consultation en ligne.
Marwan Muhammad, le 12 avril 2017. (Photo Julien Mignot)
publié le 9 mai 2018 à 20h46

C'est un joli - et intéressant - pavé dans la mare. Comme les aime Marwan Muhammad, l'ancien directeur du Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF), figure du milieu musulman. «Après plusieurs générations, les musulmans n'ont toujours pas d'instance représentative nationale qui soit à la hauteur des enjeux de notre temps», déplore-t-il dans une tribune publiée mercredi par le Monde. Pour pallier cela, l'activiste de gauche a pris les choses en main en lançant, en parallèle des travaux du gouvernement, une consultation de la base via un site internet, Consultationdesmusulmans.fr.

Audit. «Ce n'est pas une démarche personnelle, précise-t-il à  Libération Ceux qui soutiennent cette opération vont peu à peu se faire connaître.» A travers un questionnaire, les musulmans de France sont invités à dresser une sorte d'audit des structures mises en place il y a quinze ans pour organiser l'islam de France. «Il est à noter que les musulmans ne se sont pas donné les moyens suffisants pour prendre en charge ces questions à l'échelle nationale», poursuit dans son texte du  Monde Marwan Muhammad. Cette autocritique - le peu d'investissement des musulmans eux-mêmes - est peu habituelle. Tout comme l'intérêt manifesté pour l'organisation du culte, resté jusqu'à présent l'apanage de la première génération de l'immigration, les «blédards» comme on les appelle familièrement. La génération émergente des quadragénaires, à l'instar d'un Marwan Muhammad, n'a pas pu (ou voulu) trouver sa place, notamment dans la gestion des mosquées.

Familier d'une rhétorique assez clivante, Marwan Muhammad interpelle aussi dans sa tribune, très vigoureusement, le président de la République et le gouvernement, lancés depuis janvier dans une réflexion sur l'islam de France. «La façon dont l'Etat gère les citoyens de confession musulmane reste bloquée dans un autre temps, dans un autre siècle, écrit Muhammad. Cette relation est faite, le plus souvent, de contrôle et d'injonction

Au moins sur un point, l'activiste se retrouve sur la même longueur d'ondes qu'Anouar Kbibech, l'ancien président du Conseil français du culte musulman (CFCM), qui en appelle à une réforme de son institution «sinon il risque de disparaître. […] Il y a un vide à combler : il faut que le CFCM intègre en son sein des jeunes et des femmes

Propositions. Pour le moment, il règne un certain flou quant aux intentions de l'Elysée sur ce dossier sensible. En janvier, Macron avait fait part, à travers une courte interview au  JDD, de son intention de consulter et de faire des propositions lors du premier semestre de 2018. «En un an, Macron a montré qu'il tenait toujours son agenda», souligne une source proche de son dossier. On attend l'intervention présidentielle. Le mois de ramadan, qui commence dans quelques jours, pourrait en être l'occasion. Traditionnellement, le CFCM organise un repas officiel de rupture de jeûne. Une invitation a été lancée au Président pour qu'il vienne, comme l'an passé, y participer.