Pour répondre à une consultation sur l’évolution du boulevard périphérique de Paris et de sa guirlande d’autoroutes, il faut croire en son talent. Car si un génie du trafic avait trouvé la solution pour soulager les voiries les plus congestionnées de France, on le saurait. C’est pourtant à cette réflexion audacieuse que le Forum métropolitain du Grand Paris convie des équipes pluridisciplinaires internationales (architectes, urbanistes, économistes, experts en mobilité, etc.). En Ile-de France, côté circulation, tout est hors normes. Le réseau des autoroutes de l’Etat représente 2,5% de la voirie mais accueille 27% du trafic. Quant à Paris, il occupe 1% du territoire de la région mais recueille 11% des circulations. Quatre équipes seront retenues pour réfléchir dans ce contexte un peu spécial et auront jusqu’à fin 2019 pour rendre leurs conclusions.
Afin de leur préparer le travail, le Forum a réalisé, avec l’appui technique de l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) et de l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région (IAU), un «livre blanc des mobilités» à l’horizon 2030. Publié en mars et remis solennellement au préfet de région, Michel Cadot, ce jeudi, il contient des données sur la situation actuelle dont certaines déconcertantes. Exemples.
La marche progresse, et pas qu’un peu
Qui l’eut cru ? La marche à pied est désormais au premier rang des mobilités franciliennes avec 39% des trajets. Certes, les Parisiens sont les champions de l’exercice puisque 40% d’entre eux déambulent sur plus de deux kilomètres par jour mais 50% des Franciliens font quand même leur kilomètre quotidien. Fait notable, parmi tous ces marcheurs, 21% n’empruntent aucun autre mode de transport que leurs pieds.
On prend moins sa voiture, et cela dans toute la région
C’était une première : en 2010, on constatait une baisse de la mobilité en voiture de 5% dans la région Ile-de-France. Evidemment, Paris compte pour beaucoup dans ce résultat. En plus de trente ans, les déplacements en automobile dans la capitale ont diminué de 37%. Mais, plus surprenant, la baisse a aussi atteint 13% en première couronne. Seuls les habitants de la grande couronne continuent à prendre le volant.
Le trafic diminue sur le périphérique
Evidemment, vu le niveau d'où on part (1,3 million de véhicules par jour), on a du mal à le percevoir. Mais «au centre de l'agglomération, le boulevard périphérique ainsi que les axes radiaux qui y sont connectés perdent du trafic». Du coup, il augmente sur les axes de la grande couronne mais comme le volume de trafic y est moins important, cette croissance est indolore. Encore une fois, le cas de Paris intra-muros est atypique, avec une diminution de 31% de la circulation entre 2001 et 2015.
La grande migration quotidienne Est-Ouest n’existe pas
L’idée que les populations franciliennes habitent massivement à l’Est et s’entassent dans les bouchons pour aller travailler à l’Ouest est fausse. 80% des déplacements d’Ile-de-France ont lieu à l’intérieur du département et même 50% ne dépassent pas les limites de la commune. Du coup, les trajets de moins de 3 kilomètres sont largement majoritaires et seuls 5% des parcours dépassent les 21 kilomètres.
Quand on bouge, c’est d’abord pour les loisirs
Dans le temps passé à se déplacer, le célèbre «domicile-travail» a perdu sa première place. Il était «le plus chronophage», mais ce sont «les activités privées» qui consomment le plus de temps aujourd'hui, lit-on dans le «livre blanc». Cette évolution ne fait pas gagner du temps de vie pour autre chose, loin de là : en 2010, le Francilien passait 1h32 par jour à se déplacer, chiffre qui a augmenté de 15 minutes en trente ans. La moyenne française est de 52 minutes par jour.
Reste à mater «l’autosoliste»
Ce personnage, seul dans sa voiture, est le coupable des embouteillages, désigné par tous les experts. Si l’on passait de l’actuel 1,06 occupant par véhicule lors des trajets domicile-travail à 1,7, les spécialistes affirment qu’on réglerait l’essentiel de la congestion. Mais cela ne sera pas le plus facile.