Au terme d'un procès éclair d'à peine plus d'une heure, la Française Mélina Boughedir, 27 ans, a été condamnée dimanche à Bagdad à une peine de vingt ans de prison «pour son appartenance à l'Etat islamique». Sur le perron de la cour pénale irakienne, ses avocats français, Mes Bourdon, Brengarth et Pradel, ont dénoncé l'inéquité du procès, tout en se disant «soulagés» que leur cliente ait évité la peine capitale. Partie en 2015 avec son mari, Maximilien Thibaut, et leurs enfants, Mélina Boughedir a été arrêtée le 8 juillet 2017 à Mossoul. Afin d'échapper aux combats, elle est restée terrée plusieurs semaines avec ses jeunes enfants dans la cave d'une maison éventrée.
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Depuis, la Française se défend d'avoir participé aux activités de l'Etat islamique, notamment au sein des brigades de la police des femmes, la Hisba. En février, l'Irak l'avait condamné à sept mois de prison pour entrée «illégale» sur son territoire, mais la Cour de cassation a réexaminé le dossier et estimé qu'elle devait être rejugée selon la loi antiterroriste.
De ce fait, l'audience de dimanche revêtait un tout autre enjeu. Après s'être entretenus dix minutes avec leur cliente, les trois avocats français ont participé aux débats sous la forme de questions. Une faveur jugée toutefois insuffisante pour garantir les droits de la défense : «Nous n'avons pas eu accès au dossier du président du tribunal, nos observations étaient traduites directement par ses soins, et il n'a jamais été expliqué à Mélina le fonctionnement de la justice locale», regrette Vincent Brengarth, l'un des conseils de la Française. De surcroît, les deux condamnations de Mélina Boughedir – celle de février et celle de ce dimanche, ont été prononcées par le même magistrat… Un recours va être prochainement déposé devant la Cour suprême irakienne, ouvrant la voie à un possible procès en appel.
Invité à réagir lors du Grand rendez-vous sur Europe 1 et CNews, le secrétaire d'Etat en charge des Relations avec le Parlement, Christophe Castaner, s'est contenté de déclarer : «La justice irakienne est légitime à juger, elle a pris sa décision.» Vendredi, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, n'avait déjà pas fait preuve d'une grande mansuétude à l'égard de Mélina Boughedir : «Quand on va à Mossoul en 2016, c'est pour combattre. Mme Boughedir sera donc jugée sur les lieux de ses exactions. C'est la logique normale. Elle a combattu contre les unités irakiennes, elle est jugée en Irak.»