Décidément, le Grand Paris Express, enthousiasmant projet de métro automatique du futur, met le gouvernement dans des affres d’interrogation. Il lui a fallu six mois pour décider d’un nouveau calendrier de réalisation des lignes et changer au passage son directeur opérationnel, Thierry Dallard succédant à Philippe Yvin. Voilà maintenant le gouvernement empêtré depuis mars dans la désignation du président de la Société du Grand Paris (SGP). Et obligé de se dépatouiller de l’encombrante candidature spontanée de Pierre Bédier, président (LR) du département des Yvelines.
Condamné en 2009 pour corruption passive et recel d’abus de bien social à dix-huit mois de prison avec sursis et six ans d’inéligibilité, Bédier est rené de ses cendres par l’onction du suffrage universel. Côté SGP, son département n’est pas concerné par le réseau du nouveau métro, qui ne passe pas chez lui. Et côté vie métropolitaine, il s’est embarqué avec Patrick Devedjian, son homologue des Hauts-de-Seine, dans une fusion des deux départements – une conception du Grand Paris assez spéciale que l’Etat n’a jamais validée.
Hésitation
Habile politique, Bédier a joué sur la crainte des présidents des départements de la petite couronne de voir disparaitre leur institution, menacée de fusion dansl la métropole, pour obtenir leur soutien. Une formalité s'agissant de son allié Devedjian, un soutien moins gagné d'avance concernant Stéphane Troussel, président socialiste de la Seine-Saint-Denis et Christian Favier, communiste et président du Val-de-Marne. Tous deux ont pourant topé pour Bédier et ni l’un ni l’autre ne se sont exprimés sur ce choix inattendu.
La perspective de Bédier à la tête du plus grand projet d'infrastructures d'Europe à 25 milliards d'euros a en tout cas suffisamment affolé le landerneau pour que d'autres candidatures sortent. Du moins, d'autres possibilités de choix pour le gouvernement. Dans cette société publique où les élus siègent en minorité, c’est en effet l'Etat qui choisit l’un d’entre eux pour la présidence. Jusqu’à présent, un maire. D’abord, le centriste André Santini, à qui a succédé le socialiste Jean-Yves Le Bouillonnec, maire de Cachan (Val-de-Marne). En démissionnant de son poste de maire pour des raisons de santé, ce dernier a entraîné la vacance de la présidence de la SGP. Personne n’a été pris par surprise.
Pourtant, au lieu de proposer tout de suite le nom d’un successeur, le gouvernement n’a rien fait. Pierre Bédier s’est engouffré dans cette hésitation. Cette fois-ci, en décidant d'un report du conseil de surveillance de la SGP au 6 septembre, l'Etat se donne le temps de choisir un profil moins contestable. Patrick Braouezec, président de l'Etablissement public territorial Plaine commune aurait été adoubé par l'Elysée. Le département de Seine-Saint-Denis pousse de son côté Corinne Valls, maire divers gauche de Romainville et administratrice à Ile-de-France Mobilités. Manière de faire oublier un faux pas ?
Cet article a été modifié à 18h50.