A Paris, les migrants suffoquent. Plus d'un millier sont présents dans les rues où la chaleur n'est pas qu'un désagrément de plus mais un véritable catalyseur de problèmes. La directrice des missions sociales à la fondation Abbé-Pierre, Frédérique Kaba, dénonce des «conditions de vie extrêmes à l'extérieur». Dans l'imaginaire collectif, les SDF sont plus en danger l'hiver que l'été. «C'est un mythe à déconstruire, ajoute-t-elle. Il faut protéger y compris et surtout l'été ! L'ampleur du problème est nationale et il existe un vrai risque sanitaire.»
En juin, les trois plus grands campements de migrants parisiens ont été évacués : le long du canal Saint-Martin, rue des Poissonniers et sur le site dit du «Millénaire», près de la porte de la Villette. Quelque 2 500 personnes y logeaient depuis des mois. La plupart ont été pris en charge par les autorités puis répartis sur le territoire ou renvoyés dans le pays d’Europe où ils étaient entrés. En comptant les nouveaux arrivants, il reste aujourd’hui, selon la fondation Abbé-Pierre, près d’un millier de migrants, désormais sans domicile, entre les portes de la Chapelle et de la Villette. Ce sont pour la plupart de jeunes hommes majeurs et «dublinés» (soumis aux accords de Dublin) ayant fui le recensement administratif postévacuation.
La situation s'est dégradée. Ils ne peuvent pas compter sur un lieu identifié à l'avance pour passer la nuit, et faute de pouvoir travailler la journée, ils restent dans les rues de la Chapelle, des Poissonniers ou sur le boulevard Ney. C'est là où se poste le camion Médecin sans frontières deux fois par semaine. «On reçoit 80 visites en cinq heures de présence. Ceux qui viennent nous voir ont d'importants problèmes dermatologiques, explique Corinne Torre, la cheffe de mission. Leurs pieds macèrent dans les chaussures toute la journée voire la nuit. Comme ils ne se lavent pas régulièrement, cela génère des infections.»
Photo Cyril Zannettacci