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Retrouvailles

A Marseille, la France insoumise fait de l'œil à la gauche socialiste

La présence d'Emmanuel Maurel, figure de l'aile gauche du PS ce samedi à Marseille au raout du mouvement de Jean-Luc Mélenchon qu'il hésite à rejoindre, a parasité le message envoyé au même moment par le patron des socialistes depuis La Rochelle.
Jean-Luc Mélenchon, à Marseille samedi. (Photo Patrick Gherdoussi pour Libération)
publié le 25 août 2018 à 17h34

Emmanuel Maurel est à Marseille depuis quelques jours, il aime la ville. Le socialiste se balade, se baigne. Tranquille. Samedi matin, il s’est pointé à l’université d’été des insoumis, au Parc Chanot. Une présence qui fait causer : à quelques mois des élections européennes, le mouvement de Jean-Luc Mélenchon lui fait les yeux doux et lui ouvre les portes en grand. Figure montante de la gauche du PS et candidat défait pour en prendre la tête en janvier, Emmanuel Maurel, qui n’a jamais caché ses liens avec le mouvement de Mélenchon, s’interroge : quittera-t-il son parti en pleine crise pour rejoindre la bannière insoumise ?

«Pourquoi il m’insulte»

En fin de matinée, on s'assoit à sa table afin de faire le point sur sa réflexion. Il botte en touche. Et répond : «Sommes-nous dans les tractations pour la liste des Européennes ? Non. Est-ce que je discute avec les insoumis ? Oui.» Le député européen se laisse du temps. Il attend qu'Olivier Faure le premier secrétaire du PS lui fasse signe et surtout fixe une ligne : «Pour le moment je ne sais pas ce qu'il pense. Si l'on fait la même campagne avec le même slogan depuis 1999 'Et maintenant l'Europe Sociale', ça ne marchera pas !» Le socialiste rêve de rupture. Récemment, Martine Aubry l'a contacté pour lui faire comprendre qu'il joue un rôle important dans le parti. Suffisant ?

Sa présence à Marseille dépasse les frontières de la ville. À l'autre bout du pays, à La Rochelle, les élus socialistes sont rassemblés, une rentrée à huis clos pour faire le point sur l'avenir et trouver la lumière. Olivier Faure n'est pas content. La présence des socialistes chez les insoumis parasite et irrite. Emmanuel Maurel qui fut longtemps l'un des organisateurs des universités d'été du PS à La Rochelle a eu le droit à un texto désagréable du chef. Il ne comprend pas : «Pourquoi il m'insulte, j'ai toujours discuté avec les insoumis et toutes les familles à gauche, ce n'est pas nouveau et ce n'est pas moi qui lui manque de respect, qui lui parle mal, il devrait s'en prendre à Stéphane Le Foll.»

Touche d’humour

Emmanuel Maurel n'est pourtant pas le seul à Marseille, les députés Boris Vallaud et Dominique Potier sont également dans les parages. Mais eux n'adressent pas un mot à la presse. De peur de mettre un peu plus Olivier Faure en pétard. Résultat, après son intervention Boris Vallaud rase les murs. Une situation qui fait marrer un insoumis : «C'est étrange, d'autant plus qu'à l'Assemblée, le premier secrétaire discute souvent avec Mélenchon, il est même très gentil, peut-être qu'il fait ça sous la pression de Le Foll et Rebsamen qui nous détestent.»

Emmanuel Maurel ne compte pas s'arrêter en route : il revient à Marseille les 8 et 9 septembre avec le club politique qu'il vient de créer avec des copains, Causes communes. Et Jean-Luc Mélenchon participera à une table ronde. D'ailleurs, plusieurs têtes de la France Insoumise espèrent que le député européen profitera de l'occasion pour claquer la porte du Parti socialiste. Un député LFI avec une touche d'humour : «Il fait ce qu'il veut, on ne va pas le forcer mais idéologiquement il n'a plus rien faire au PS, après il est attaché à son parti et on peut comprendre que le divorce prenne un peu de temps.»

«Responsabilités»

Dans les travées du Parc Chanot, on croise une autre tête de gauche qui s'interroge : Karima Delli. La députée européenne écolo est malheureuse. Elle ne comprend pas la décision de son parti, EELV, qui l'a placée en sixième position sur la liste, une place très incertaine, alors que ses collègues sortants comme elle, Yannick Jadot et Michèle Rivasi occupent les deux premières places. Elle a parlé de sa situation avec le chef de famille des écolos, David Cormand. «Il a reconnu que ce n'était pas normal», dit-elle.

«Dégoûtée», elle est prête à prendre «ses responsabilités» dans les prochaines semaines, assure-t-elle. Pour rejoindre la France Insoumise ? Elle ne répond pas. Une chose est certaine : c'est une aubaine pour LFI qui cherche à élargir sa base. Manuel Bompard, l'une des figures du mouvement, confirme et ironise : «Vous avez vu, on discute avec tout le monde et après on nous accuse d'être des sectaires…»