Le gouvernement a donc choisi : pour faire des économies en 2019, il va geler certaines prestations sociales et les pensions de retraite. Dans un entretien au Journal du dimanche, le Premier ministre, Edouard Philippe, confirme ainsi une piste évoquée dans la presse ces derniers jours : si «aucune prestation sociale ne sera réduite», jure-t-il, les APL, les allocations familiales et les pensions de retraite «progresseront de façon plus modérée», à peine + 0,3 % par an en 2019 et en 2020. De quoi pénaliser clairement certaines familles et des retraités (déjà affectés par la hausse d'1,7 point de CSG en 2018), puisque le niveau de l'inflation en France est très au-dessus de ce chiffre : en juillet, l'augmentation des prix a été de + 2,3 % sur un an. «Désindexation des retraites combinée à hausse de la CSG = 578 euros de perte de pouvoir d'achat par an pour un retraité qui a 1 300 euros de retraite par mois», a réagi dès samedi soir sur Twitter la présidente du groupe Nouvelle Gauche à l'Assemblée nationale, Valérie Rabault.
Certes, à quelques jours de la présentation d'un plan antipauvreté repoussé après l'été, le gouvernement s'épargne une polémique en choisissant d'exclure de ce quasi-gel le RSA, la prime d'activité et les allocations pour handicapés : «Certaines seront même très significativement revalorisées : la prime d'activité, le minimum vieillesse, l'allocation pour les adultes handicapés», précise ainsi Philippe dans le JDD. Mais l'exécutif risque d'avoir beaucoup de mal, après avoir rendu en 2018 près de 5 milliards d'euros aux plus aisés en supprimant l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et mis en place une flat tax de 30 % sur les revenus du capital, à expliquer qu'il faut désormais faire des économies sur les allocations et les retraites…
«Nous assumons une politique de transformation et de maîtrise des dépenses qui privilégie, je le redis, la rémunération de l'activité et qui rompt avec l'augmentation indifférenciée des allocations», se justifie le Premier ministre dans le JDD. Avec une annonce pour appuyer cette ligne : la suppression des cotisations salariales sur les heures sup fixée à 2020 est, elle, avancée à 2019. «Pour une personne payée au smic, cette mesure représentera en moyenne plus de 200 euros supplémentaires par an, estime Edouard Philippe. Nous voulons que les Français puissent revenir vers le travail, que ce travail paie, et qu'il paie de mieux en mieux. C'est le sens de notre action.»
Cette mesure coûteuse (3 milliards d'euros par an selon l'Observatoire français des conjonctures économiques) ne va pas aider le gouvernement à tenir les engagements budgétaires pris au printemps devant la Commission européenne (un déficit public maintenu à 2,4 % du PIB en 2019). Avec une prévision de croissance révisée à 1,7 % du PIB au lieu du 1,9 % anticipé jusqu'ici pour l'an prochain, Philippe assume que le déficit public connaîtra «un rebond» en 2019. Ce qui risque de faire hurler une droite pour qui la suppression de 4 500 fonctionnaires d'Etat en 2019 et plus de 10 000 en 2020 n'est pas à la hauteur des engagements pris (50 000 pour l'ensemble du quinquennat).