De mémoire de sondeur, c’était du jamais vu : après un premier été cafouilleux, sanctionné par une sévère dégringolade dans les enquêtes d’opinion, Emmanuel Macron avait vu sa cote remonter à l’automne 2017. Une performance inédite. Sarkozy et Hollande, eux, n’avaient jamais pu reprendre les points perdus dans les premiers mois suivant leur élection. Cet étonnant rebond, le chef de l’Etat le devait à son activisme et à son volontarisme, notamment sur la scène internationale. En cette rentrée 2017, il avait été particulièrement entreprenant sur la question européenne, avec une série de discours qui se voulaient refondateurs : le 7 septembre au pied de l’Acropole et deux semaines plus tard dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne.
Cette année encore, l'Europe sera au cœur de sa rentrée politique. Laissant à son Premier ministre le soin de révéler les douloureux arbitrages de la loi de finances (lire page 3), il doit présenter ce lundi, devant les ambassadeurs réunis à l'Elysée, sa feuille de route diplomatique. L'occasion pour lui, à neuf mois des élections européennes, de défendre à nouveau sa vision d'une Europe plus intégrée, dotée d'une défense propre, d'un budget pour la zone euro ou encore d'une politique commune pour les migrants. Le chef de l'Etat s'envolera le lendemain pour trois jours au Danemark, puis en Finlande. Il a prévu d'animer le 6 septembre au Luxembourg «une consultation citoyenne sur l'Europe», avant de recevoir le lendemain la chancelière Angela Merkel à l'Elysée. Macron peut-il en attendre un nouveau rebond dans l'opinion comparable à celui de l'an dernier ? Dans un climat morose et une conjoncture dégradée, cela sera difficile. Le sondage Viavoice publié ce lundi par Libération incite à la prudence : interrogés sur ce que devraient être, selon eux, les priorités de l'exécutif, les sondés ne sont que 8 % à citer la refondation de l'Europe, très loin derrière l'emploi, le pouvoir d'achat ou la lutte contre la pauvreté. On voit mal, dans ces conditions, comment les Français pourraient applaudir aux sacrifices auxquels on leur demande de consentir au nom de la discipline européenne en matière de déficit public. Nullement découragés, les chefs de la majorité LREM veulent croire qu'il est encore temps de convaincre que l'Europe est la réponse aux grands défis du moment, qu'il s'agisse du commerce international ou de l'immigration. Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'année passée n'aura pas permis de progrès notables. Les migrants naufragés pourraient en témoigner… Le chef de l'Etat et sa majorité n'ont plus que neuf mois - c'est très court - pour installer l'idée que l'enjeu des européennes se résumera au choix, passablement binaire, entre l'Europe de Macron et celle des nationalistes.