Imperturbables. Ni l'affaire Benalla, ni la popularité émoussée du chef de l'Etat, ni même le fléchissement de la croissance, pourtant annonciateur de choix budgétaires douloureux, ne semblent entamer le moral des troupes macronistes. Si l'on en croit plusieurs de leurs responsables, c'est sans états d'âme que les députés LREM reprendront le chemin de l'Assemblée nationale le 4 septembre (avec l'examen du projet de loi Pacte en commission). Plus «déterminés» que jamais à faire triompher leur «ambition réformatrice». Aussi sûrs de leur fait que de l'impuissance de leurs adversaires. «L'élément marquant de cette rentrée, c'est la division de toutes les oppositions et leur incapacité à défendre une ligne politique alternative claire, relève le député des Deux-Sèvres Guillaume Chiche. Dans ce paysage fragmenté, la majorité est le seul pôle de stabilité. Et elle a rarement été aussi compacte : vécue par beaucoup comme un coup bas politicien, l'affaire Benalla a resserré les rangs.»
«Bonnes nouvelles». Une cohésion qui, de l'avis du porte-parole LREM à l'Assemblée, devrait résister aux passes d'armes budgétaires à venir : «Il n'y a plus de débat type gauche-droite au sein de notre majorité, souligne Gilles Le Gendre. Les grandes mesures fiscales sont derrière nous, tout comme les grandes réformes de libéralisation du marché du travail. Cet automne, il n'y aura que des bonnes nouvelles sur le pouvoir d'achat, entre début de la baisse de la taxe d'habitation et suppression totale des cotisations salariales. Le terrain est beaucoup moins miné qu'à l'automne dernier.» Même le ralentissement de la croissance (1,7 % au lieu des 2 % attendus en 2018) est relativisé. «La conjoncture n'est pas si mauvaise», soutient la coordinatrice des députés LREM à la commission des finances de l'Assemblée, Amélie de Montchalin, relevant le rebond de l'investissement au deuxième trimestre 2018 (+ 1,1 %). D'ailleurs, complète Gilles Le Gendre, «notre problème, c'est que l'économie n'est plus en mesure de tenir un rythme de croissance fort, du fait de capacités de production et de personnels qualifiés insuffisants. C'est ce problème structurel que nous essayons de résoudre».
Boomerang. Reste que les chiffres sont têtus. Aux dires de Bercy, une croissance inférieure aux prévisions de 0,2 point en 2019 correspond à 0,1 point de déficit public en plus, soit la bagatelle de 6 milliards d'euros. Le contenir, comme l'exécutif s'y est engagé auprès de Bruxelles, supposerait de couper d'autant dans les dépenses publiques… Alors que la rentrée devait se dérouler sous le signe du «social» (plan de lutte contre la pauvreté, réforme de l'hôpital et de la dépendance…), elle menace d'être marquée du sceau de l'austérité. D'autant que la baisse de la revalorisation des retraites par rapport à l'inflation, annoncée par Edouard Philippe dimanche (lire page 3), pourrait redonner de l'air aux oppositions.
A quelques mois du scrutin européen, crucial pour Macron, l'effet boomerang risque d'être sévère. Pour éviter que les «choix clairs» de la majorité ne s'accompagnent de coupes trop «franches» dans les budgets du logement, de l'emploi ou des missions de l'Etat, Montchalin suggère déjà une parade. Si elle prône le respect «plein» de la trajectoire de baisse des déficits publics d'ici à 2022, la députée de l'Essonne se réfère à celle votée par les députés le 20 décembre (soit 2,9 % du PIB). Mais pas à la trajectoire, autrement plus exigeante (2,4 %), que le gouvernement a transmise à Bruxelles au printemps…