Et voilà, Emmanuel Macron est comme les autres, il case les copains, les courtisans, il distribue des fromages. Le jeune homme pressé est arrivé aux affaires en se proclamant différent des autres, les anciens, ceux qui attribuaient prébendes et missions creuses (les chasses présidentielles etc.) : ça, c’était avant, disait-il, sous mon règne on ne goûtera pas de ce pain-là.
La nomination de Philippe Besson au poste de consul général à Los Angeles vient troubler le message. Car Philippe Besson est devenu un proche, si ce n'est un ami, du couple Macron et il ne s'en cache pas. Pire, il a publié il y a un an un livre laudateur, Un personnage de roman racontant les coulisses de la conquête du pouvoir par l'ancien ministre de l'Economie de François Hollande. Un livre dont il a fait la promotion en faisant la promotion d'Emmanuel Macron. Attention, nous n'avons rien contre Philippe Besson, très bon écrivain et homme affable qui, d'ailleurs, dans une autre vie, travailla fugacement à Libération comme DRH, mais Philippe, non, pas ça, pas vous ! On n'accepte pas un cadeau pour bons et loyaux services !
Car il est là le problème : la récompense, le renvoi d'ascenseur. D'Helsinki, Emmanuel Macron s'en est défendu ce jeudi en mélangeant torchons et serviettes, carottes et pommes de terre : «Il n'y a chez moi aucun copinage pour services rendus. Regardez le gouvernement. Si je servais les gens en fonction de leur implication dans la campagne présidentielle, aurais-je choisi le Premier ministre que j'ai nommé il y a quinze mois ?» Il nous avait habitués à mieux.
Certes, la nomination d’écrivains aux postes de consul et d’ambassadeur est une vieille tradition française, l’entourage de Macron le martèle depuis plusieurs heures. De Chateaubriand à Daniel Rondeau en passant par Jean-Christophe Rufin, ils sont nombreux ceux qui n’ont pas pu résister aux chants des sirènes du lointain, à l’appel des dorures (Romain Gary n’en fait pas partie, il était diplomate avant d’être écrivain). Mais justement, si l’on prend Emmanuel Macron au pied de la lettre, ça, c’était l’ancien monde où l’on mélangeait allègrement les genres, où l’on remerciait les obligés. La nomination de Philippe Besson, dans le contexte économique et social actuel, donne l’image d’une caste qui se distribue les faveurs au gré des opportunités. D’un nouveau monde qui, d’un coup, prend un terrible coup de vieux.