«La réforme sur l’accord du participe passé est habile, car elle est claire et simple. Tout le monde peut la comprendre, et elle évite pièges et ambiguïtés. Si elle s’appliquait, les jeunes ne seraient pas déconcertés. En revanche, je ne me vois pas lire Proust, où les participes sont nombreux, dans cette nouvelle écriture. Toutefois, je n’hésiterais pas à utiliser la nouvelle règle dans mes propres textes si elle était adoptée. Il faudrait pour cela un assentiment général des pays francophones : le Québec, la Suisse, les pays africains…
«Les auteurs de la tribune publiée lundi dans Libération ont commis une erreur terrible : s'en prendre à l'Académie française, dont l'avis positif est pourtant essentiel en vue d'une telle évolution. Ses membres sont les gardiens rigoureux de la langue française et, en effet, je ne suis pas sûr que cette idée l'emporte sous la coupole. Cependant, il n'est pas impossible qu'ils débattent de cette question.
La question de l’enseignement est importante pour comprendre cette proposition. Il est révélateur que les deux auteurs de la tribune soient d’anciens professeurs qui ont probablement vécu les difficultés de l’enseignement de ces règles grammaticales. Mais attention, simplifier la règle ne veut pas dire que, d’un coup, l’esprit des enfants s’ouvrira aux sortilèges de la littérature.
«Le fait que cette proposition vienne de Belgique doit également être noté. J’ai coutume de dire que ce pays est celui de la bande dessinée mais aussi de la grammaire, car on y trouve de très nombreux linguistes, grammairiens ou professeurs érudits - il suffit de citer Maurice Grevisse (1895-1980) et son Bon Usage - très attentifs à l’évolution du français, qui se penchent sur leur langue. Les Français me semblent moins accros que les Belges ou les Québécois à cette idée.
«Cela dit, j’aime beaucoup les règles de la grammaire française et ses exceptions ! Les dictées jouaient beaucoup avec l’accord des participes : "ils se sont plu", donc "ils se sont mariés"… Mais encore une fois, si la règle change, il faut l’appliquer.»