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A la barre

Mort de Clément Méric : péripétie de dernière minute pour la première audience

Le procès de trois hommes impliqués dans la rixe fatale au jeune militant antifasciste, a débuté ce mardi devant la cour d’assises de Paris avec l'absence d'un des prévenus. Entre faux départ et ambiance tendue.
Esteban Morillo et son avocat Patrick Maisonneuve au palais de justice. (Photo Stéphane Lagoutte. Myop pour Libération)
publié le 4 septembre 2018 à 19h24

Deux accusés à l'air sage et une chaise vide : c'est ainsi que s'est ouvert mardi matin le procès faisant suite au décès de Clément Méric, jeune militant antifasciste de 18 ans, tué lors d'une rixe avec des skinheads en 2013. «Nous commençons cette audience avec une réelle difficulté», a déploré la présidente, Xavière Siméoni, soulignant que Samuel Dufour «est introuvable». Renvoyé aux côtés d'Esteban Morillo pour «violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner» avec les circonstances aggravantes qu'elles ont été commises avec une arme et en réunion, le jeune boulanger de 25 ans ne s'est tout simplement pas montré dans la cour d'assises de Paris. Panique ultime ? Vertige des 20 ans de réclusion criminelle encourus ? Pas vraiment. «C'est pas que je ne me suis pas présenté. Je me suis fait interpeller par la police ce matin à 8 heures devant le Palais parce qu'il y avait une manifestation et ils cherchaient des signalements comme moi…», raconte l'intéressé en début d'après-midi, au retour d'une matinée au commissariat.

Cheveux bien peignés

C'est ainsi qu'après quatre ans d'instruction et quelques péripéties de dernière minute, trois hommes – qui comparaissent libres sous contrôle judiciaire – ont finalement pris place sur le banc des accusés. Esteban Morillo, 26 ans, n'a plus rien du look skinhead, crâne rasé et blouson avec écusson tricolore. C'est désormais un jeune homme aux cheveux bien peignés et raie sur le côté, arborant une veste de costume noire et chemise soigneusement boutonnée. D'une voix calme, il se présente : «Je travaillais à la société de nettoyage Onet. J'ai appris hier que je n'y travaillais plus.» Samuel Dufour, jean et pull bleu marine, tatouages apparents, est aujourd'hui «employé de boulangerie». Quant au dernier, Alexandre Eyraud, 29 ans, jugé pour «violences en réunion» envers les camarades de Clément Méric et passibles de cinq ans d'emprisonnement, il exerce le métier d'éleveur canin.

Tous écoutent sans ciller la lecture de l'acte d'accusation. Flash-back qui ramène au 5 juin 2013, dans le IXe arrondissement de Paris. Lors d'une vente privée de vêtements de la marque Fred Perry, les skinheads proches de la mouvance d'extrême droite et militants de Troisième Voie dirigée par Serge Ayoub rencontrent fortuitement les militants antifascistes. Echanges de mots hostiles. Puis, à la sortie, des coups. Clément Méric, 18 ans, frêle silhouette fragilisée par une leucémie, tombe. Il mourra d'un œdème cérébral.

Agitation

Qui a commencé ? Les skinheads étaient-ils armés de poings américains ? Combien de coups ont été portés au jeune étudiant de Sciences Po ? Par qui ? Il appartiendra désormais aux six jurés, trois hommes et trois femmes, de démêler les versions contradictoires des témoins et protagonistes, de faire la lumière sur la mort du militant antifasciste qu'un camp considère comme un «crime politique» et l'autre comme un acte de «légitime défense». «Beaucoup d'agitation se trouve à l'extérieur de l'audience ou en tout cas dans le Palais. Je souhaite que ce procès se déroule dans la plus grande quiétude. Je compte sur la bonne volonté de tous pour respecter ces exigences, pour que nous rendions la meilleure justice», a prévenu la présidente.