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Libération
Violences 1er Mai

Sénat : la commission d'enquête veut contraindre Benalla à une audition

Affaire Benalladossier
L'ex-collaborateur du Président, qui refuse pour le moment de répondre à sa convocation, risque jusqu'à deux ans de prison et une amende de 7 500 euros.
Emmanuel Macron et Alexandre Benalla, porte de Versailles à Paris, le 24 février 2018. (Ludovic Marin. AFP)
publié le 11 septembre 2018 à 17h44
(mis à jour le 11 septembre 2018 à 18h32)

La commission d’enquête sénatoriale sur l’affaire Benalla fait sa rentrée ce mercredi matin avec une déconvenue. L’ancien adjoint au chef de cabinet d’Emmanuel Macron a fait savoir par le biais de son avocat qu’il ne se rendra pas à la convocation que lui avaient récemment adressée les parlementaires. Les sénateurs souhaitaient l’entendre le 19 septembre.

Du point de vue de la défense, sa décision s'explique aisément. Alors qu'il est mis en examen notamment des chefs de «violences en réunion», «immixtion dans l'exercice d'une fonction publique» et «port sans droit d'insignes réglementés», Alexandre Benalla devrait répondre sous serment aux nombreuses questions des sénateurs, sans l'assistance de son avocat et sous la pression d'une audition publique. Un cadre bien éloigné des garanties prévues par la procédure judiciaire.

Poursuites judiciaires

Mais les textes encadrant les commissions d'enquête confèrent aux sénateurs d'importants pouvoirs coercitifs. Alexandre Benalla pourrait ainsi être contraint de se présenter et s'expose à des poursuites judiciaires en cas de refus. «Toute personne dont une commission a jugé l'audition utile est tenue de déférer à la convocation qui lui est délivrée, si besoin est, par un huissier ou un agent de la force publique, à la requête du président de la commission», détaille la fiche du Sénat relative aux commissions d'enquête. Si Alexandre Benalla refuse effectivement de comparaître, il s'expose à deux ans de prison et une amende de 7 500 euros. Ces dispositions sont prévues par l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.

Dans un communiqué publié ce mardi, les sénateurs responsables de la commission d'enquête, Philippe Bas (LR), Muriel Jourda (LR) et Jean-Pierre Sueur (PS), ont d'ailleurs rappelé cette obligation à Alexandre Benalla : «Il n'appartient pas aux personnes convoquées pour être auditionnées de décider de se présenter ou non à cette convocation.»

«Une commission d'enquête ne peut pas traiter de faits qui relèvent de la justice mais ici, il y a quantité d'autres faits, d'autres réalités, liés aux institutions, qui ne relèvent pas de l'instruction judiciaire, ajoute Jean-Pierre Sueur. Nous sommes très clairs là dessus et nous n'avons d'ailleurs pas empiété sur l'instruction judiciaire lors des précédentes auditions.»

Immixtion du pouvoir législatif

C’est par ailleurs l’ancien proche collaborateur du président de la République qui avait lui-même ouvert la porte à son audition lors de son passage au journal télévisé de TF1 à la fin du mois de juillet. Jusqu’à ces déclarations, le président de la commission, Philippe Bas, avait d’ailleurs évoqué la problématique institutionnelle d’une telle audition, avec le risque d’une immixtion du pouvoir législatif dans le travail de la justice. Mais le plan de média bien huilé de Benalla et son accord de principe pour une audition l’avait convaincu que celle-ci était utile.

Cette limite identifiée n'empêchera d'ailleurs pas les sénateurs d'auditionner ce mercredi le commissaire de la préfecture de police de Paris Maxence Creusat également mis en examen dans la procédure judiciaire des chefs de «détournement d'images issues d'une vidéoprotection» et «violation du secret professionnel». Seront également entendus dans la matinée, François Xavier-Lauch, chef de cabinet d'Emmanuel Macron et général Eric Bio-Farina, commandant militaire de l'Elysée.

Ce dernier avait déjà été entendu par la commission d’enquête constituée à l’Assemblée nationale mais rapidement sabordée sur un désaccord relatif à la liste des personnes qu’elle souhaitait convoquer. La présidente, Yaël Braun-Pivet (LREM), s’était notamment opposée à l’audition du secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler, et d’Alexandre Benalla lui-même.