Le patron de LR, Laurent Wauquiez, porte ce jeudi soir la contradiction au Premier ministre, Edouard Philippe, également passé par le parti de la rue de Vaugirard et proche d'Alain Juppé, lors de l'Emission politique sur France 2. Les deux hommes, jeunes énarques, «promotion Marc Bloch» (1995-97) pour l'ancien maire du Havre et «Nelson Mandela» (1999-2001) pour le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes et se sont croisés au Conseil d'Etat tout comme au sein de leur parti mais sans jamais vraiment se côtoyer et encore moins s'apprécier.
Deux styles vont s'opposer. Celui du locataire de Matignon d'une retenue toute british et celui plus «rentre dedans» du patron de la droite. Le premier considère Laurent Wauquiez «comme un politicien sans scrupule et insincère» et l'autre le regarde «non pas comme un traître à la droite puisqu'il considère que Philippe n'a jamais été de droite», explique un de ses proches mais comme un homme éloigné des réalités du pays. «Pour Laurent, Edouard Philippe est un homme désincarné qui n'a pas les deux pieds dans la terre, sans terroir.»
«Rêveur»
Pour Laurent Wauquiez qui, neuf mois après son élection, peine toujours à se voir reconnaître une crédibilité dans ses propres rangs, tout l'enjeu est d'apparaître comme le principal leader de l'opposition face au chef du gouvernement. «J'ai été fondateur de ce parti. J'ai été premier directeur général avec Alain Juppé. L'idée était de faire un grand parti de la droite et des centres, avec une base politique très large. Je l'ai vu s'étioler au fil des années, s'appauvrir autour d'une ligne idéologique de plus en plus à droite qui perdait d'abord le centre, ensuite la droite modérée. Je l'ai vu être incapable de dire explicitement au soir du premier tour de l'élection présidentielle, dire qu'il fallait voter pour Emmanuel Macron face à Marine Le Pen. Ce jour-là, j'ai été un peu surpris par ce qu'était devenue cette formation politique. Et je la vois aujourd'hui critiquer des mesures qu'elle appelait de ses vœux il y a quelques mois. Ça me laisse, je dois dire, rêveur», avait pointé le Premier ministre au moment où LR se préparait à l'exclure de ses rangs.
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Edouard Philippe qui avait d'abord soutenu Alain Juppé pendant les primaires de la droite puis François Fillon avant de s'en éloigner, aura beau jeu de rappeler que certaines des mesures mises en œuvre par son gouvernement comme «la suppression de l'ISF était inscrite dans les programmes des candidats de droite sans que celle-ci ait le courage de les mettre en œuvre».
Pour éviter de se trouver cornérisé, «Laurent Wauquiez va l'attaquer sur ce budget en trompe-l'œil, sur la fiscalité qui s'alourdit pour les plus modestes avec notamment l'augmentation des taxes sur l'essence et sur la défense des territoires et celle des collectivités locales». Sans oublier la hausse de la CSG pour les retraités. Wauquiez, président de région, va jouer les défenseurs de la France des oubliés, chère à la présidente du Rassemblement national. Au risque d'apparaître une fois de plus comme celui qui va chasser sur les terres de Marine Le Pen.