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Libération
Remaniement

Objectif : requinquer le quinquennat

A l’approche des élections européennes, l’exécutif va devoir mettre en œuvre plusieurs promesses de campagne de Macron dans l’espoir de regagner des points dans l’opinion.
Edouard Philippe et Benjamin Griveaux, mardi à l'Assemblée nationale. (Photos Marc Chaumeil.)
publié le 9 octobre 2018 à 21h16

Sitôt le remaniement effectué, les ministres reprendront le rythme de réformes imposé par l'exécutif. La «transformation du pays»,élément de langage de la majorité, est appelée à se poursuivre pour prouver que le Président traduit «en actes» son programme de campagne. En espérant se requinquer dans les enquêtes d'opinion avant un premier test électoral crucial : les européennes de fin mai.

Le budget de l’an II

Priorité à l'économie. Les députés en ont à peine terminé avec le projet de loi «croissance et transformation des entreprises» (Pacte) adopté mardi en première lecture qu'ils entament cette semaine le marathon budgétaire en commission des finances. Attaquée l'an dernier sur les «cadeaux» faits aux plus riches avec sa réforme de la fiscalité du capital, la majorité souhaite cette année prouver qu'elle «récompense le travail» et agit «en faveur du pouvoir d'achat». La bataille de chiffres est lancée : depuis la présentation du projet de loi de finances pour 2019 fin septembre, le gouvernement communique sur les «6 milliards d'euros» de baisses d'impôts pour les ménages afin de prouver qu'il en fait pour tout le monde. Le hic, c'est que pour parvenir à ce total, les ministres de Bercy, Bruno Le Maire et Gérald Darmanin, y intégraient notamment la suppression des cotisations salariales chômage et maladie… de 2018. Face à une droite qui en veut plus sur la baisse de la dépense publique et «la lutte contre le gaspillage», et une gauche qui devrait monter au créneau sur les quelque 19 milliards (après plus de 8 milliards en 2018) de baisses de prélèvements obligatoires accordées aux entreprises, la majorité devra prouver que le «en même temps» macronien tient toujours. Le tout sur fond de ralentissement de la croissance (+ 1,7 % du PIB prévu par le gouvernement en 2018 et 2019 après + 2,3 % en 2017) et de «rebond» du déficit public (2,8 % du PIB l'an prochain après 2,6 % annoncé pour cette année). Pour ne déraper à nouveau et enfreindre la règle européenne des 3 % de PIB, Bercy rabote certaines prestations sociales.

Un nouveau deal sur l’assurance chômage

Le premier n'a pas suffi. L'encre de l'accord interprofessionnel du 22 février à peine sèche - et ses traductions dans la loi «choisir son avenir professionnel» pas encore votées -, Macron a demandé mi-juillet aux partenaires sociaux de se remettre autour d'une table. Selon les vœux de la ministre du Travail, syndicats et organisations patronales sont appelés à engager une «réforme systémique de l'assurance chômage». Soit économiser 3 à 3,9 milliards d'euros en trois ans pour réduire la dette de l'Unédic qui atteindra 35 milliards cette année. Dans sa lettre de cadrage, l'exécutif les appelle à imaginer «les conditions d'un retour à l'emploi plus rapide […] et permettre aux entreprises de trouver sur le marché du travail les compétences dont elles ont besoin». Fin septembre, Philippe a évoqué la dégressivité des allocations pour les plus hauts revenus. En échange, l'exécutif est prêt à instaurer un «bonus-malus» sur les contrats courts pour pénaliser les entreprises qui en abusent.

La révision constitutionnelle en rade

Elle doit retenter sa chance à l’Assemblée nationale en janvier. Laissée en plan cet été dans la foulée de l’affaire Benalla, la révision constitutionnelle attend qu’on lui trouve un créneau dans un agenda législatif chargé. Outre des dispositions consensuelles (suppression de la Cour de justice de la République, réforme des nominations au parquet, fin de la présence de droit des anciens présidents au Conseil constitutionnel), des promesses de campagne hérissent le poil des oppositions, comme la réduction d’un tiers du nombre de parlementaires. Les députés de gauche et de droite, regonflés, espèrent revoir largement la copie gouvernementale. Or le projet de loi constitutionnelle, premier volet d’un ensemble de trois textes, devra être approuvé tel quel au Sénat avant de passer la barre des trois cinquièmes des suffrages des parlementaires lors d’un Congrès à Versailles. Le tout à l’approche des européennes, une période guère propice pour toper avec le camp adverse.