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Libération
Affaire Benalla

Benalla: le certificat médical du manifestant molesté a été antidaté

Le manifestant qui assure avoir été victime d'Alexandre Benalla lors de la manifestation du 1er mai a fourni à la justice un certificat médical antidaté, a révélé ce dimanche le «JDD». Si ce nouvel élément affaiblit les accusations du manifestant, son avocat rappelle que «la faute du médecin ne change rien à l’affaire».
Vincent Crase (à g. lunettes sur le crâne) s'en prenant à un manifestant avec Alexandre Benalla, le 1er mai à Paris. (Photo Naguib-Michel Shidom. AFP)
publié le 21 octobre 2018 à 13h01

Petit souci pour la défense du manifestant molesté par Alexandre Benalla le 1er mai. Le certificat médical relevant des blessures sur le jeune homme et transmis à la justice a été antidaté, a indiqué l'avocat du manifestant confirmant une information du JDD. Le 22 juillet, l'ancien collaborateur du président Emmanuel Macron avait été mis en examen pour «violences en réunion n'ayant pas entraîné d'incapacité temporaire de travail» (ITT), sur la base des images le montrant en train de rudoyer, sans arme, un couple en marge d'une manifestation du 1er Mai place de la Contrescarpe à Paris.

Mais l'avocat des deux jeunes gens, qui s'étaient portés partie civile trois jours plus tard, réclamait depuis une aggravation des charges, notamment au vu des blessures supposées du jeune homme. Il avait produit à cet effet un certificat médical du médecin généraliste de Georgios D., qui évaluait à six jours l'ITT du jeune homme. Dans ce document, daté du 11 mai, le docteur «évoque des traces de coups sur la poitrine et une raideur cervicale», avait déclaré Me Sahand Saber le 25 juillet.

Seulement, «la médecin qui l'a délivré a admis devant la police avoir antidaté le document», écrit le JDD. Le patient «est venu me voir le 23 juillet en m'expliquant qu'il était impliqué dans l'affaire Benalla et que son avocat lui demandait un certificat médical […]. Je le reçois rapidement dans l'après-midi et je lui ai fait le certificat que vous avez» sans nouvelle consultation, a-t-elle déclaré aux enquêteurs le 20 septembre, selon le procès-verbal rapporté par le JDD. La praticienne a néanmoins confirmé la réalité de la consultation du 11 mai, où le jeune cuisinier grec s'était plaint de douleurs cervicales en raison de «coups de matraques» reçus le 1er mai. «Je n'ai pas rédigé le certificat médical le 11 mai, car il ne me l'avait pas demandé et je ne lui ai pas proposé», a expliqué cette généraliste de Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine).

«Je n’aurais pas dû rédiger ça à la va-vite»

Sollicité par l'AFP, l'avocat du manifestant a pour sa part pointé la responsabilité du médecin. «Georgios n'ayant pas eu copie de ces constatations, il est retourné la voir le 23 juillet, elle a cherché dans ses archives et elle lui a imprimé ce certificat», a dit Me Sahand Saber. «A aucun moment, il ne pensait se faire remettre un document antidaté, il pensait que c'était une copie», a-t-il fait valoir. Contacté par Le Monde, l'avocat souligne également que «la faute du médecin ne change rien à l'affaire : M.Benalla a été filmé en train de commettre des violences et il demeure mis en examen de ces chefs ».

Le 14 mai, lors d'un nouveau rendez-vous, le médecin lui avait prescrit des anti-inflammatoires et établi un certificat d'arrêt de travail, notant qu'il s'était «bloqué le dos» la veille «en prenant sa douche», toujours selon le JDD. La généraliste signataire du certificat falsifié a confessé : «Je n'aurais pas dû rédiger ça à la va-vite, c'était un lundi et une grosse journée pour moi. Je n'ai pas pris conscience de l'ampleur médiatique autour de mon patient. Je reconnais mon erreur.» Dans le procès-verbal, la médecin, qui avait fait état dans le certificat des «traces de coups», avoue : «C'était vraiment très léger. C'était des égratignures.» Avant d'ajouter qu'elle a indiqué avoir constaté des «traces de coups» car «c'est lui qui a dû me le dire. Pour moi c'était des égratignures.»

Dans ce dossier, Georgios D., 29 ans, et sa compagne de 30 ans, Chloé P., ont été auditionnés le 19 septembre par les juges d'instruction. Devant les magistrats, ils ont reconnu des jets de projectiles - une carafe d'eau et un cendrier - vers les CRS, à l'origine de leur interpellation musclée. Placés en garde à vue pour ces faits le 2 octobre, ils sont convoqués au tribunal correctionnel pour y être jugés l'an prochain pour «violences sur personnes dépositaires de l'autorité publique». Outre les violences en réunion, Alexandre Benalla reste aussi mis en examen pour «immixtion dans l'exercice d'une fonction publique», «port public et sans droit d'insignes réglementés», «recel de détournement d'images issues d'un système de vidéoprotection» et «recel de violation du secret professionnel».