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Sexe

Porno amateur : les actrices mises à mâles

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Dans le livre-enquête «Judy, Lola, Sofia et moi» sur le X en France, le journaliste Robin D’Angelo explore le milieu très hiérarchisé du «pro-am», où les pratiques dégradantes envers les femmes sont monnaie courante.
Reportage réalisé en janvier 2017 sur le porno amateur avec le journaliste Robin D'Angelo et l'actrice Anna Lilou. (Photo Paul Arnaud)
publié le 21 octobre 2018 à 20h26

Célian, producteur-acteur, a promis 300 euros à Madison, une Albanaise de 29 ans de passage à Paris pour tourner des vidéos X. En préambule, il insiste auprès de son cadreur du jour : «Surtout, tu ne coupes jamais la caméra, quoi qu’il se passe. Il faut qu’on voie sa réaction, c’est ça qui est important, OK ?» Quelques minutes plus tard, en pleine action, l’actrice explose : «Stop it ! Stop it !» Célian était en train de gifler ses seins siliconés, après l’avoir fait suffoquer lors d’un 69 puis écrasée «façon Weinstein», ose-t-il. La scène est interrompue, l’ambiance électrique. Madison s’insurge : le «brutal sex» n’était pas au programme. Célian avance que c’était pourtant clair avec l’agence qui les a mis en contact. Demande de l’actrice : il faudra augmenter son cachet de 100 euros, ce que le producteur concède.

La tension redescend d'un cran, et les violents ébats reprennent, comme si de rien n'était. Après cinquante minutes, Madison repart en Uber et envoie un tweet à ses fans : une photo des coulisses avec des cœurs. «Regarde le professionnalisme !» s'exclame Célian. Le cadreur, lui, n'en revient pas. Il vient de comprendre que l'actrice, qu'on a prise par surprise, ce qui est un motif pour établir un viol en temps normal, a monétisé une forme de consentement pour une scène dégradante.

Il s'avère que le cameraman est plus qu'un amateur. Il s'agit, en réalité, d'un journaliste embarqué. Robin D'Angelo, 32 ans, a pl