Menu
Libération
Nouvelle-Calédonie

A Nouméa, la victoire du «non» amène son lot de questions

Au lendemain du référendum et du non à l'indépendance, le Premier ministre rencontre ce lundi des partis divisés sur l'éventualité d'une seconde consultation.
Le Premier ministre Edouard Philippe, lundi à Nouméa. (Photo Théo Rouby. AFP)
publié le 5 novembre 2018 à 12h45

Que va-t-il advenir de l’accord de Nouméa ? Au lendemain de la victoire du «non» à l’indépendance en Nouvelle-Calédonie, la question s’impose aux forces politiques locales et à l’Etat. Sa parole était très attendue à l’issue d’un vote révélant le partage du territoire calédonien entre deux aspirations : l’une indépendantiste, enracinée au nord de la Grande Terre et dans les îles, l’autre fidèle à la République française et concentrée au Sud, un signe de l’Etat était attendu.

Après l’intervention d’Emmanuel Macron dimanche, Edouard Philippe, arrivé du Vietnam, a passé la journée de lundi sur le Caillou afin de s’entretenir avec les représentants des principales formations locales. Fidèle à sa ligne depuis qu’il a, comme d’autres Premiers ministres avant lui, pris en main le dossier calédonien, Philippe s’est d’abord posé en garant du dialogue. Et a convié toutes les parties à un nouveau grand palabre, lors d’un comité des signataires qui sera organisé à Paris en décembre. L’éventuelle organisation d’un nouveau référendum sera au centre des discussions. L’accord de Nouméa, signé en 1998, prévoyait en effet qu’une deuxième et une troisième consultation puissent être organisées à la demande du Congrès de la Nouvelle-Calédonie.

«A la carte»

Les loyalistes, victorieux mais moins largement que prévu, avec 56,4% des bulletins, souhaitent tourner la page des consultations. «Le vote de dimanche a été totalement significatif, juge Virginie Ruffenach, secrétaire générale du Rassemblement-Les Républicains, parti de droite fermement pro-français. Nous avons dit au Premier ministre qu'une autre consultation n'aurait pas un résultat différent, et que ces référendums sont source de déstabilisation et d'incertitude économique. La politique est une matière vivante, on peut chercher une autre voie de dialogue que l'accord.»

Mais le camp indépendantiste, au vu du résultat encourageant du «oui», plaide pour l'organisation d'un nouveau référendum dans les deux ans, comme l'envisageait l'accord de Nouméa. «On a eu l'occasion de lui dire [au Premier ministre, ndlr] que nous allons poursuivre le chemin, dans la sérénité. Ce qui se profile à l'horizon, c'est le prochain référendum. L'accord, ce n'est pas un menu à la carte», a insisté Rock Wamytan, de l'Union calédonienne, qui conduisait la délégation indépendantiste.

A Nouméa, lundi, Edouard Philippe n'a pas voulu s'engager dans ce débat : «Nous sommes tenus par ces accords [de Nouméa] et nous ne voulons pas en sortir, a-t-il expliqué. Mais cela ne veut pas dire qu'il ne faudrait pas tenir compte des résultats électoraux et notamment du référendum qui a eu lieu dimanche.» Edouard Philippe a surtout dit sa volonté de débattre «des enjeux économiques et sociaux» qui ont «parfois été placés au second plan», derrière les questions institutionnelles.

Feux

L’autre question que se posent les Calédoniens est celle de la sécurité et de la paix. Après une campagne référendaire marquée par la sérénité, la nuit a été émaillée de plusieurs incidents à Nouméa : des voitures brûlées dans une concession automobile, une animalerie incendiée et des caillassages dans plusieurs quartiers populaires.

A Saint-Louis, foyer habituel de troubles situé sur la commune du Mont-Dore, la route est bloquée depuis dimanche soir par des jeunes en colère qui ont allumé un impressionnant incendie. Un escadron de gendarmes et des blindés ont été envoyés sur place pour tenter de rétablir le calme. Coincé chez lui comme beaucoup d'autres, un habitant du Mont-Dore Sud joint par téléphone témoigne d'autres feux allumés intentionnellement par des jeunes mélanésiens, devant son domicile et ailleurs dans son quartier. «On commence à avoir assez peur», reconnaît-il.