Ils espéraient un seul candidat, rassembleur, pour éviter d’afficher – encore – leurs divergences. Ils seront finalement plusieurs à briguer la succession de Pascal Pavageau, secrétaire général démissionnaire de Force ouvrière, poussé vers la sortie par la polémique entourant le fichage de cadres de son syndicat à grand renfort de quolibets et de qualificatifs calomnieux. Au total, trois syndicalistes se sont portés volontaires, avant la date butoir, pour reprendre le flambeau. Les différents courants de FO, troisième force syndicale française, n’ont pas réussi à s’unir autour d’une candidature consensuelle. Preuve que les tensions mises en lumière par le dernier congrès entre le courant dit «réformiste», fidèle à l’ancien numéro 1 du syndicat Jean-Claude Mailly, et celui, plus dur, de Pascal Pavageau, perdurent.
«Reconstruire l’unité de FO»
Patrice Clos, secrétaire national des transports et de la logistique de Force ouvrière, a été le premier à se lancer la semaine dernière. L'homme de 53 ans est plutôt identifié comme proche de la ligne dure de FO. Sa fédération n'a d'ailleurs pas validé le rapport d'activité de Jean-Claude Mailly en avril, lui reprochant son manque d'entrain contre les ordonnances réformant le code du travail fin 2017, après la loi travail en 2016. Dans une lettre adressée aux membres du comité confédéral national (CCN), le parlement du syndicat, Clos explique être «en capacité de reconstruire l'unité de FO, en respectant les sensibilités traditionnelles, mais sans que celles-ci ne prennent le pas dans les décisions». Et d'ajouter : «Cette candidature ambitionne de permettre à notre organisation de sortir d'un mois de turbulences avec un nouveau secrétaire général n'ayant aucune autre étiquette que la liberté et l'indépendance, principes cardinaux de Force ouvrière.»
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Il a été rejoint par Christian Grolier, 52 ans, secrétaire général de FO fonction publique, décrit en interne comme proche du courant trotskiste au sein de FO. Lors du congrès d'avril, ce défenseur du «service public républicain» avait toutefois fait preuve de retenue, en épargnant Jean-Claude Mailly et en expliquant ne «pas être là pour polémiquer». Choisissant plutôt de taper sur le gouvernement, Grolier avait appelé les militants à un vote franc en faveur de Pavageau afin de lui offrir «un mandat clair». Quant au troisième candidat, Yves Veyrier, il est déjà membre du bureau confédéral, en charge des études prospectives. A 60 ans, il en est le doyen. Plutôt proche de Jean-Claude Mailly, il était déjà au bureau confédéral quand ce dernier était à la tête de FO. Ce qui, pour certains, en ferait un bon candidat de transition.
Stigmates
Les trois syndicalistes ont désormais deux semaines pour s’affronter avant le vote du 21 novembre, lors de la prochaine réunion du CCN qui rassemble les responsables des 22 fédérations et des 105 unions départementales. Une première dans l’histoire de ce syndicat, habitué aux candidatures uniques, ou à deux candidats maximum. En 1989, Marc Blondel l’avait emporté devant Claude Pitous, puis en 2004, Jean-Claude Mailly avait affronté Jean-Claude Mallet, avant que ce dernier ne renonce. Quant au dernier congrès, il avait consacré le seul candidat en lice : Pascal Pavageau. Cette unité de façade cachait déjà péniblement les divergences internes. Quelques mois plus tard, elles n’ont pas disparu et s’accompagnent désormais de nouvelles tensions liées aux révélations sur le fichier. Autant de stigmates que FO voudrait effacer au plus vite à l’approche, début décembre, des élections professionnelles dans la fonction publique.