En 2018, la région Occitanie a fait de l’alimentation la grande cause régionale de l’année. Vice-président en charge de l’agriculture et de l’agroalimentaire, Jean-Louis Cazaubon explique la démarche.
Dans une région aussi vaste que l’Occitanie, l’idée de «manger local» peut-elle devenir une réalité ?
Oui, si on l’organise. Dans cette région, nous avons beaucoup de filières territorialisées et la réputation de certaines a franchi les frontières : le Roquefort, le Laguiole… Ce sont des filières à forte valeur ajoutée dans lesquelles, si les gens travaillent bien, ils gagnent leur vie. En Occitanie, l’agriculture, l’agroalimentaire et la forêt représentent 165 000 emplois et 22 milliards de chiffre d’affaires annuel. Dans nos grandes régions, la vitalité économique se concentre autour des métropoles, mais avec l’agroalimentaire, on développe aussi le rural.
Quels sont les obstacles ?
Le paradoxe, c’est que la région a énormément de signes officiels de qualité, avec 260 labels et autres distinctions dans les terroirs mais, malgré cela, le revenu de nos producteurs est dans le peloton de queue au niveau national. Avec nos savoir-faire, et l’attente des consommateurs qui demandent du terroir, nous devons nous demander comment récupérer des parts de marché avec nos produits. Dans la restauration collective, les planètes sont alignées pour passer à 40 % de local dont 20 % de bio. Mais en sommes-nous capables ?
Le code des marchés publics vous interdit d’inscrire une «préférence régionale» dans vos marchés…
Il est possible d’exiger un certain pourcentage de produits sous label, d’aménager le marché en ce sens. Mais ensuite, comment s’organise-t-on ? La logistique pose problème, car ce que demande le gestionnaire de restauration collective, même s’ils ont tous des objectifs de qualité dans la tête, c’est une seule livraison et une seule facture. Les légumeries sont une des réponses. Pour la viande, la chambre d’agriculture des Hautes-Pyrénées a mis en place avec les producteurs et les collectivités un planning prévisionnel en fonction des besoins.
L’approvisionnement local n’est-il pas trop cher ?
Pour amorcer la pompe, la région va accorder aux collectivités une subvention de 16 centimes par repas si leurs cantines s’engagent à utiliser 40 % de produits locaux dont 20 % de bio. L’aide va durer deux à trois ans et déjà, pour cette année, plus de cinquante lycées se sont portés candidats. Soit un tiers des établissements de la région.
En y ajoutant les collèges, 75 millions de repas sont pris chaque année dans la restauration publique. Le collectif et le traditionnel sont complémentaires. Les côtes de bœuf, ce n’est pas dans les cantines qu’on va les manger. Il faut faire travailler toute la filière viande ensemble. Nous devons reprendre nos marchés. 80 % de la viande consommée dans le périmètre de la métropole de Toulouse ne vient pas de la région !
Les consommateurs vont-ils vous soutenir dans cette reconquête ?
Nous avons lancé une grande enquête et nous avons déjà eu 52 000 réponses. Ce qui passe en premier, c’est la demande d’une alimentation saine, de qualité, de saison et de proximité. Tout cela avant le bio. Dans cette région, nous sommes capables de produire une alimentation de qualité qui ne soit pas réservée à une élite.