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Justice

Les deux enquêtes visant Mélenchon et son parti confiées à des juges d'instruction

Le parquet de Paris a justifié vendredi sa décision «au regard des éléments d’ores et déjà rassemblés et de la complexité des investigations qui restent à réaliser».
Lors du meeting de Jean-Luc Mélenchon à Pau le 8 novembre. (Photo Guillaume Rivière)
publié le 9 novembre 2018 à 19h02
(mis à jour le 9 novembre 2018 à 19h26)

Jean-Luc Mélenchon voulait une information judiciaire. François Molins l'a entendu. Le procureur de la République de Paris a annoncé vendredi l'ouverture de deux instructions distinctes visant le leader de La France insoumise et plusieurs de ses proches. Le parquet a justifié cette décision «au regard des éléments d'ores et déjà rassemblés et de la complexité des investigations qui restent à réaliser». Le 16 octobre, des perquisitions avaient été menées dans 15 endroits différents et 21 auditions avaient été réalisées, entraînant alors la colère folle de Mélenchon et de plusieurs cadres du parti.

Dans la foulée de cette annonce du parquet de Paris, le leader de LFI s'est félicité de sortir des «griffes de l'arbitraire». Si cette décision offrira effectivement aux différents mis en cause un cadre légal beaucoup plus avantageux concernant les droits de la défense, elle atteste aussi du sérieux des indices récoltés et ouvre la voie à d'éventuelles mises en examen.

Machinerie

La première enquête vise «les conditions d'emploi des assistants parlementaires» de Jean-Luc Mélenchon en tant que député européen. Le chef de La France insoumise est soupçonné d'avoir profité des budgets accordés pour siéger au Parlement européen afin de rémunérer des militants qui travailleraient en réalité pour son parti. Autrement dit, «détournement de fonds publics», ainsi que recel et blanchiment de ce délit.

La deuxième instruction qui concerne le «financement de la campagne électorale» de Jean-Luc Mélenchon lors de la dernière élection présidentielle est notamment ouverte des chefs d'«escroquerie et tentatives d'escroquerie», d'«abus de confiance» ainsi que blanchiment et recel de ce délit, et d'«abus des biens ou du crédit d'une société par actions simplifiées». Ces investigations qui visent toute la machinerie de la campagne s'annoncent comme les plus complexes.

C'est à la suite d'un signalement de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) que cette seconde enquête a été initialement ouverte par le parquet. Si le compte de Jean-Luc Mélenchon avait bien été validé, c'est surtout les importantes «réformations» des dépenses qui étaient au cœur des débats : 434 939 euros avaient été ainsi retoqués. Les rapporteurs soupçonnaient d'importantes surfacturations de deux structures parties prenantes de la campagne : l'Ere du peuple et Mediascop.

Montants suspects

Une grande partie de ces «réformations» concernaient la première, une association montée pour servir de «support technique et logistique à toutes initiatives prises au service des idées développées par Jean-Luc Mélenchon pour réaliser la révolution citoyenne» lors de la campagne. En cause : des factures aux intitulés sibyllins et aux montants suspects. Par ailleurs, la CNCCFP s'étonnait que l'Ere du peuple se soit affranchie de payer la TVA. Le procureur de la République de Paris précise d'ailleurs avoir reçu au mois d'août un signalement de la part de Tracfin, l'organisme de lutte contre la fraude rattaché au ministère de l'Economie.

Mediascop, l'autre structure au cœur des soupçons, est une société fondée par Sophia Chikirou. Cette proche conseillère de Jean-Luc Mélenchon avait pris en charge une grosse partie de la communication du candidat. Les factures de sa société avaient représenté 11% des dépenses totales de la campagne. Ce montage a permis à Sophia Chikirou de s'assurer une belle marge qu'elle garde pour l'instant secrète.