Après les champs de bataille de la Grande Guerre, Emmanuel Macron s'est fait déposer mercredi soir au large de Toulon sur le porte-avions Charles-de-Gaulle, d'où il a répondu dans ce cadre ultra régalien aux questions du 20 heures de TF1. L'occasion pour lui de faire la pédagogie des mesures présentées le matin même par son Premier ministre pour calmer la colère des automobilistes, de redire combien il «respecte» le mécontentement des gilets jaunes qui doivent manifester samedi et de dénoncer le «poujadisme contemporain» de ses opposants politique sur la question fiscale.
L'occasion aussi de s'expliquer sur sa déclaration très controversée, le 6 novembre sur Europe 1. Selon lui, le Vieux Continent doit se fixer comme objectif la construction d'«une vraie armée européenne […] sans dépendre seulement des Etats-Unis et de manière plus souveraine». De quoi déclencher une série de tweets assassins de Donald Trump qui a fustigé une «insulte», avant de rappeler que les Français seraient aujourd'hui en train de «parler allemand» si les forces américaines n'avaient pas volé à leur secours en 1917 et en 1941. «Entre alliés on se doit le respect, je ne veux pas entendre le reste», a répondu Macron rappelant que de Lafayette à l'Afghanistan, la France et les Etats-Unis combattent côte à côte depuis plus de deux siècles.
La colère de Trump avait été décuplée par une autre déclaration de Macron samedi sur CNN : «Ce que je ne veux pas voir, c'est les pays européens augmenter leurs dépenses de défense pour acheter de l'équipement américain. Si on augmente nos budgets, c'est pour construire notre autonomie.» Insupportable pour le président américain qui cache à peine que sa croisade pour une augmentation des dépenses de défense en Europe vise à faire prospérer les exportations d'armes américaines. Sur TF1, Macron a répété que «l'autonomie» de l'UE en matière de défense devait être un objectif prioritaire. «Etre allié, ce n'est pas être vassal», a-t-il ajouté, soulignant qu'Angela Merkel avait elle aussi plaidé pour une «armée européenne».
Le 26 septembre 2017 à la Sorbonne, il avait proposé de construire une défense européenne fondée sur «une culture stratégique commune». Selon lui, «l'incapacité à agir ensemble» met en péril «notre crédibilité en tant qu'Européens».
Après dix-huit mois de travaux pour un coût supérieur à un milliard d'euros, l'unique porte-avions de l'armée française entame une deuxième vie. Depuis son entrée en service en 2001, il a déjà effectué plus de 23 tours du monde. Sa dernière mission en Méditerranée visait l'organisation Etat islamique. Dans l'arsenal militaire, le porte-avions est le principal outil de «projection en autonomie». C'est pourquoi la phase d'étude pour un éventuel successeur au Charles-de-Gaulle a été lancée le mois dernier. Coût estimé : près de 5 milliards d'euros. Militant d'une défense européenne autonome, Macron a confirmé qu'il arbitrerait, «d'ici 2020», en fonction de «l'évolution de la menace», sur la construction d'un nouveau porte-avions de nouvelle génération.