Ils se considèrent comme le «premier étage de la fusée». L'association 40 Millions d'automobilistes, née il y a douze ans lors de l'apparition des radars automatiques, ne cherche pas forcément les avant-postes à la veille de la manifestation des «gilets jaunes». Il est vrai que le mouvement a maintenant très largement dépassé la strate des défenseurs pur jus de la bagnole. «Nous ne sommes pas dépossédés, parce que ça ne nous gêne pas que d'autres fassent le boulot», glisse Pierre Chasseray, le délégué général de cette association qui revendique 1,5 million de sympathisants (ceux qui ont cliqué sur la case «voulez-vous continuer à recevoir nos informations»), 400 000 euros de budget et cinq permanents.
Depuis plusieurs semaines, 40 Millions d'automobilistes a habilement su faire monter la mayonnaise autour de la hausse du prix du carburant. Son dernier coup d'éclat : l'opération «coût de pompe» incitant les automobilistes à envoyer leur facture d'essence à l'Elysée. La lettre type d'accompagnement a été téléchargée plus d'un million de fois, assure le délégué général de l'association. Depuis, il se veut discipliné : «Les "gilets jaunes" ont dit "pas de récupération politique, ni associative". Je réponds OK.» Derrière cette position se profile une stratégie placée sous le signe du pragmatisme. Puisque la mobilisation est à son sommet et que les politiques sont entrés dans la danse, un mouvement catégoriel comme 40 Millions d'automobilistes aura du mal à se faire entendre. Il pourrait même essuyer quelques coups au passage en se fâchant avec des élus.
L'association s'est donc contentée d'un mot d'ordre aussi soft que consensuel pour ce samedi : un gilet jaune sur le tableau de bord, et pas de débordements. Il est vrai qu'elle joue déjà le coup d'après, lorsque les effets de la mobilisation seront retombés. Une nouvelle campagne sur «l'injuste prix du carburant» est d'ores et déjà prévue si l'augmentation du prix de l'essence prévue au 1er janvier est maintenue par le gouvernement.