Menu
Libération
justice

Jean-Claude Romand : la demande de libération conditionnelle devant les juges

Condamné en 1996 à la perpétuité pour le meurtre de cinq membres de sa famille, il a déposé une demande de liberté conditionnelle qui sera examinée mardi par le tribunal d'application des peines.
Jean-Claude Romand lors de son procès à Bourg-en-Bresse, le 25 juin 1996. (Photo Philippe Desmazes. AFP)
publié le 19 novembre 2018 à 16h49

Depuis 2015, il aurait pu prétendre à une vie sans grillage et à un horizon sans miradors. Pourtant, il n'en a jamais fait la demande. Jusqu'à ce jour de septembre où les magistrats du tribunal d'application des peines de Châteauroux (Indre) ont vu arriver sur leur bureau un fragment d'histoire criminelle, un dossier estampillé «Jean-Claude Romand». Condamné en 1996 à une peine de réclusion criminelle à perpétuité assortie de vingt-deux ans de sûreté, celui que la presse a surnommé le «docteur Romand» a présenté une demande de libération conditionnelle. Après un premier renvoi, elle sera examinée mardi à la maison centrale de Saint-Maur où il est incarcéré. «C'est un détenu qui ne pose aucun problème, sans passé disciplinaire», souligne l'administration pénitentiaire. Les juges prendront également en compte les rapports des psychiatres ainsi que son projet de réinsertion qui est «solide avec de nombreuses garanties», selon une source proche du dossier qui considère «que tous les voyants sont au vert».

L'affaire, qui a inspiré romanciers et cinéastes, tient finalement en un mot, c'est un «anéantissement» pour reprendre l'ordonnance de renvoi devant la cour d'assises. «Le samedi 9 janvier 1993, Jean-Claude Romand assassinait sa femme et ses deux enfants, ses père et mère, avant d'essayer, en vain, de tuer celle qui aurait été son ancienne maîtresse.» Voilà. Un homme a méthodiquement supprimé tous ceux qu'il aimait. Pas par goût du lucre, jalousie ou accès de colère mais pour éviter l'infamie, celle d'être démasqué. «Peur de décevoir», bredouillera Jean-Claude Romand lors de son procès. Sans parvenir à davantage d'introspection : «Je n'ai pas de réponse […] Un premier mensonge en appel un autre et c'est pour la vie.» Les jurés ont dû se résoudre à l'incompréhension en condamnant le faussaire devenu auteur d'un quintuple assassinat.

«Pathologie narcissique»

Pendant dix-huit ans, ce fils unique de forestier du Jura, qui a grandi dans une famille aimante, s'est inventé une existence, il a soigneusement tissé une toile de mensonges. Pas simplement dans les dîners en ville mais dans l'intimité, dans la chambre à coucher. Jean-Claude Romand s'est créé un monde où il faisait «comme si». Comme s'il était ancien interne des hôpitaux, comme s'il était maître de conférences, comme s'il était chercheur à l'OMS, comme s'il allait dans des colloques à l'étranger. Sa femme Florence l'a regardé partir chaque matin sacoche sous le bras. Lui, passait ses journées seul dans sa voiture-bureau. Jusqu'au jour où, acculé par les dettes, il a compris que l'imposture était sur le point d'être découverte. Alors, d'un même geste, Jean-Claude Romand a détruit le théâtre et tous ceux qui en faisaient partie. «Mythomane atteint d'une pathologie narcissique», ont dit les experts lors du procès.

Détenu modèle, solitaire et entouré d’images pieuses, il a mené une vie carcérale sans heurts. Après avoir suivi une formation d’ingénieur du son, il a travaillé aux ateliers de restauration de documents sonores pour l’Institut national de l’audiovisuel. A-t-il réussi en vingt-cinq ans à l’ombre à répondre à tous les «pourquoi» ? Ceux qui l’avaient terrassé devant la cour d’assises. Du moins, a-t-il essayé ? C’est ce que devront déterminer, mardi, les juges du tribunal d’application des peines. Leur décision devrait être mise en délibéré.