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Libération
Éditorial

Rescousse

publié le 18 décembre 2018 à 20h16

Et si c’était le vrai tournant ? Le plus difficile à négocier pour Emmanuel Macron ? Bien sûr, la crise des gilets jaunes a contraint le chef de l’Etat à corriger sa politique économique. Mais les concessions annoncées pour améliorer le pouvoir d’achat des plus modestes ont davantage constitué une inflexion qu’un vrai changement de cap. Il n’en va pas de même avec l’appel à la rescousse lancé auprès des maires par le chef de l’Etat. Soucieux que le «grand débat national» organisé pour tenir compte du sentiment de déclassement territorial exprimé sur les ronds-points ne fasse pas pschitt, Emmanuel Macron se tourne logiquement vers les élus de proximité que sont les maires. Depuis un mois, nombre d’édiles ont sans doute souvent hésité le matin en s’habillant entre leur gilet jaune ou leur écharpe tricolore… Que le Président se tourne vers l’élu préféré des Français est donc logique, mais pas évident pour autant. D’abord à cause des maires eux-mêmes. Beaucoup n’ont pas attendu la crise actuelle pour dénoncer la faiblesse des moyens dont ils disposent, exprimer leur fatigue, annoncer leur envie de raccrocher. Difficile dans ces conditions d’être les premiers de cordée du grand débat national voulu par le chef de l’Etat. Pas évident aussi à cause d’Emmanuel Macron lui-même. Le Président, rappelons-le, n’a jamais été élu. Il s’appuie par ailleurs sur un parti, En marche, qui ne dispose d’aucune assise locale. Le président de «la start-up nation» a théorisé le nécessaire contournement des corps intermédiaires pour réformer la France. Par tactique politique mais aussi poussé par son tempérament, il a tiré sur la corde jupitérienne de nos institutions. La crise des gilets jaunes impose au chef de l’Etat d’effectuer un tournant girondin, amorcé lors du dernier remaniement. Gare au tête-à-queue.