Chaque début d'année, c'est la même ritournelle. Dans le jargon, on parle de marronniers, ces articles qui reviennent à date régulière. Après la Saint-Sylvestre, ils sont tous intitulés : «Ce qui change au 1er janvier» (là, là ou encore là) pour évoquer la hausse légale du smic, des allocations sociales, du prix du gaz, etc. Dans les textes, ces modifications sont bien inscrites au premier jour de la nouvelle année. Mais en pratique, elles interviennent plus tard sur les factures, bulletins de paie ou relevés d'allocations. Explications.
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Hausse du smic : fin janvier
S'il n'a pas bénéficié de «coup de pouce» de la part du gouvernement, le salaire minimum va connaître une augmentation d'1,5%: 10,03 euros brut de l'heure et 1 521,22 euros brut par mois en 2019, contre 1 498,47 euros en 2018. En net, cela donne 1 204,20 euros mensuels pour cette année (contre 1 187,83 euros l'an dernier), soit une hausse d'un peu plus de 16 euros qui sera visible pour les salariés à la fin du mois… lorsqu'ils recevront leur fiche de paie. Le salaire minimum n'avait pas connu un tel bond «légal» depuis la période 2011-2012. La raison : étant donné qu'il est indexé sur l'évolution des prix à la consommation, le smic bénéficie en 2019 du fort niveau d'inflation connu en 2018.
Heures supplémentaires défiscalisées : fin janvier
Elle aussi se verra sur les fiches de paie de janvier : intégrée au projet de loi votée en urgence fin 2018 pour répondre aux gilets jaunes, la défiscalisation des heures supplémentaires démarre ce mois-ci. Au départ, le gouvernement avait seulement prévu une simple désocialisation (suppression des cotisations salariales) à partir du mois d'octobre. Contraint de répondre aux demandes de «plus de pouvoir d'achat» exprimées sur les ronds-points, l'exécutif a ressorti cette mesure symbolique du «travailler plus pour gagner plus» des années Sarkozy. Les heures sup seront donc exonérées de cotisations salariales (hors CSG, CRDS et cotisations patronales) mais aussi d'impôt sur le revenu. Selon le gouvernement, dès 2019, un salarié au smic effectuant plus de 100 heures supplémentaires sur l'année pourra prétendre à 155 euros de plus par an.
Baisse des prix du gaz : de fin janvier à juin
C'est une des concessions accordées le 4 décembre par Edouard Philippe aux gilets jaunes lors de sa déclaration solennelle faite depuis Matignon : «Ni les tarifs de l'électricité, ni ceux du gaz n'augmenteront […] durant l'hiver qui s'annonce.» Depuis, la commission de régulation de l'énergie (CRE) a annoncé au 1er janvier une baisse des tarifs réglementés d'Engie de 2% pour cause de «diminution des prix d'importation observés sur les marchés de gros». Cette dernière sera visible sur les prochaines factures des consommateurs. Ensuite, le ministère de la Transition écologique et solidaire a affirmé le 28 décembre dans un communiqué avoir «pris les mesures adéquates pour que les tarifs réglementés d'Engie n'augmentent pas jusqu'à la fin du mois de juin 2019». Concrètement, après des années de hausses, le gaz réglementé verra son prix baisser de 0,73% en février, restera stable en mars avant de diminuer encore en avril (-1,91%), mai (-0,6%) et juin (-0,45%). Pour ce qui est des prix de l'électricité, le gouvernement n'a plus communiqué depuis début décembre.
Modération des pensions de retraite et de certaines allocations : début février et courant avril
Eux en revanche ne profiteront pas de la traditionnelle «revalorisation légale». Les retraités et certains allocataires ne verront pas leurs pensions et leurs prestations sociales suivre la hausse des prix connue l'an dernier. Pour économiser 3,5 milliards d'euros en 2019, elles seront ainsi «modérées» de +0,3%, soit bien en deçà de l'inflation prévue par le gouvernement pour cette année (+1,3%). Ce coup de frein, «qui engendrera, comme le précisent les documents budgétaires, un gain de pouvoir d'achat moindre par rapport aux règles de revalorisation légale (par exemple, de l'ordre de 15 euros par mois en 2019 pour une retraite de base de 1 500 euros)», ne concernera pas toutes les prestations. Seules les allocations familiales, d'invalidité, l'allocation adulte handicapée ou encore les aides personnelles au logement (APL) seront concernées par cette «augmentation maîtrisée». Revalorisés officiellement au 1er janvier, les retraités verront leurs pensions de base évoluer début février. Pour les allocataires (hors APL qui augmenteront en janvier), ce sera en avril.
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Augmentation exceptionnelle de la prime d’activité : 5 février
Ce serait un record. D'ordinaire, les caisses d'allocations familiales mettent trois mois pour verser les montants «revalorisés» de la prime d'activité. En 2018 par exemple, la revalorisation exceptionnelle était inscrite dans la loi au «1er août». Les nouveaux montants (avec le rattrapage) n'ont été visibles qu'en octobre. Mais pris de court par l'annonce d'Emmanuel Macron le 10 décembre pour répondre au mouvement des gilets jaunes – «le salaire d'un travailleur au smic augmentera de 100 euros par mois dès 2019 sans qu'il en coûte un euro de plus pour l'employeur» – le gouvernement s'est arraché les cheveux pour que cette hausse du salaire minimum via la prime d'activité soit visible le plus vite possible. Dans une interview aux Echos le 17 décembre, Edouard Philippe s'est engagé à ce que la prime soit versée «dès le 5 février […] pour compléter le salaire de janvier». A condition qu'il n'y ait pas de bug du côté de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) : «Après un travail de vérification approfondi avec l'ensemble de ses services», la Cnaf «est en mesure de garantir la faisabilité informatique de cette réforme dans les délais requis», a toutefois voulu rassurer l'administration dans un communiqué mi-décembre.
Baisse de la CSG pour une partie des retraités : pas avant juillet
Sous la pression des gilets jaunes, Emmanuel Macron a choisi d'annuler la hausse de CSG pour la moitié des retraités touchés depuis le 1er janvier 2018. Quelque 3,8 millions de foyers verront leur taux de CSG revenir à 6,6% après un an à 8,3%. Mais si, dans la loi, la mesure de correction est applicable depuis le 1er janvier 2019, dans les faits, les retraités verront ces changements sur leurs feuilles de pension en… juillet. «Compte tenu des délais de mise en œuvre de la mesure, les titulaires de revenus de remplacement concernés bénéficieront d'un remboursement, dans des conditions définies par décret», a précisé l'exécutif dans le projet de loi gilets jaunes. Les retraités vont donc devoir patienter.