Tolérance zéro à l’égard des violences dont des journalistes ont été victimes ces dernières semaines lors de rassemblements des gilets jaunes ; ouverture en revanche à la critique et à la réflexion sur la pratique de notre métier. Accepter les secondes, ne cautionner d’aucune manière les premières, tel est le sens de l’introspection à laquelle nous nous livrons, alors que chaque week-end qui passe semble creuser un peu plus le fossé entre les manifestants et les médias. Les agressions, les menaces, physiques ou verbales dont ont été victimes certains de nos confrères sont inacceptables. Travailler caméra à l’épaule sous la protection de gros bras devrait normalement être réservé aux reportages en zones de guerre. C’est aujourd’hui la seule manière pour des journalistes télé d’exercer leur métier. Impossible de s’y résoudre, sauf à renoncer à cette liberté fondamentale de la presse, issue des Lumières, inscrite dans la Déclaration des droits de l’homme et la Constitution française.
Ces principes posés, comment nier que la défiance envers les médias, pas nouvelle, s’est accentuée ces dernières années, et plus particulièrement ces derniers mois ? L’essence même de notre métier est de s’interroger, de remettre en cause une vérité apparemment évidente, de soulever les tapis. Dans «esprit critique», bien individuel le plus précieux du journaliste, il y a «critique». La séquence des gilets jaunes, comme il y a quinze ans la crise des banlieues, nous invite à l’exercer contre nous-mêmes. Banco. Les révolutions industrielles et technologiques à l’œuvre depuis près de vingt ans ont tellement bousculé le secteur de l’information qu’une telle réflexion ne peut qu’être profitable. A condition néanmoins d’éviter l’autoflagellation, elle serait injuste. Et la généralisation, ce serait stupide. La variété des médias, des titres, de leurs orientations, choix et modes de traitement de l’information étant la première garantie à offrir à des citoyens libres : celle de choisir où et comment ils veulent s’informer.