Face au bal de plus en plus bruyant des prétendants à son fauteuil, Anne Hidalgo prépare activement sa contre-offensive. Jeudi, la maire de Paris a chargé son ex-directeur de campagne devenu son adjoint à l'urbanisme et au Grand Paris, Jean-Louis Missika, de porter sur les fonds baptismaux l'association «Paris en commun», futur fer de lance de sa campagne. Tout en prenant garde à conserver ses distances avec la structure. «Anne continue de se consacrer pleinement à son mandat, justifie Missika, désormais président de l'association. Elle ne déclarera sa candidature que lorsque l'offre politique sera connue dans sa totalité. Pour autant le moment viendra où l'exécutif devra faire un pas de côté pour entamer avec les Parisiens un dialogue préparatoire à l'élection.»
C'est en fait par une polémique que l'affaire démarre. Danielle Simonnet, candidate pressentie par La France insoumise pour conduire la bataille de Paris, ayant décidé d'utiliser le slogan «Paris en commun» pour sa propre campagne. «C'est du braconnage !» s'emporte Missika, arguant que les services d'Hidalgo ont déposé la marque à l'Inpi en janvier 2018, huit mois avant Simonnet. Et le même de se dire «abasourdi» que la militante LFI se pique d'utiliser un terme en complète contradiction avec la philosophie qu'elle prétend défendre. Pour l'équipe d'Hidalgo, «commun» renvoie de fait à un nouveau mode de gestion collaborative des ressources au-delà de l'antagonisme entre économie administrée et économie de marché. «Si Simonnet use de "commun" dans son sens le plus trivial, à savoir "collectif", qu'elle appelle son association "Paris ensemble" !» s'agace Missika, zappant un peu vite que le livre-programme de Jean-Luc Mélenchon et LFI s'intitule l'Avenir en commun. L'avocat Jean-François Mignard, membre du conseil d'administration de l'association de précampagne d'Hidalgo, a été chargé de régler la querelle.
Pour l'équipe Hidalgo, l'ambition de «Paris en commun» va bien au-delà du slogan. Après dix-huit ans de gestion socialiste dont cinq sous la houlette de l'ex-adjointe de Bertrand Delanoë, l'usure guette le pouvoir en place. A moins d'un projet vraiment innovant, difficile d'espérer rassembler une majorité de Parisiens en 2020. «Hidalgo essaye d'expliquer qu'elle pourra régler, au cours de sa dernière année de mandat et sur le suivant, des problèmes qu'elle a largement contribué à créer : personne n'est dupe. La pratique d'Hidalgo est trop verticale», tacle le député Agir Pierre-Yves Bournazel. Autant dire que «Paris en commun» a du pain sur la planche. Au cours des prochains mois, l'association va se retrousser les manches avec de nombreux débats et ateliers de travail sur les «enjeux de fond» de la métropole - qualité de l'air, surtourisme, contrôle des données numériques d'intérêt général, etc. Le 13 février, sa toute première «conversation politique» portera sur la méthode, à savoir sur la «réhabilitation des experts dans le débat démocratique». Façon d'inviter les aspirants à l'Hôtel de Ville à réfléchir avant de parler. Ainsi, de l'idée popularisée par Gaspard Gantzer de supprimer le périphérique : «Est-ce bien raisonnable quand on sait que c'est un million de véhicules qui l'empruntent chaque jour ? interroge Missika. Si on interroge les experts, on comprend qu'un périph, ça ne se détruit pas en un claquement de doigts…»