«C'est simple, dans chaque discipline, les enseignants ont une diminution des heures d'enseignement. Cela ne se voit pas au premier coup d'œil car les élèves gardent le même nombre d'heures au total. Mais la qualité ne sera pas la même. Par exemple, en français, en classe de seconde, j'avais six heures devant les élèves. Je passe à cinq, soit du temps en moins permettant les demi-groupes. Notre lycée vient de recevoir son enveloppe annuelle d'heures à se répartir… Et elle est maigre ! On se retrouve à faire des choix impossibles : préférer des demi-groupes en maths ou maintenir le latin ? Entre nous, les enseignants, c'est compliqué. On essaie de ne pas jouer la carte de la rivalité, mais ce n'est pas évident. Des postes sont supprimés. Surtout, on feint de nous associer à la discussion, de «nous responsabiliser» en nous mettant autour d'une table. Ils appellent ça "les conseils pédagogiques". Ils ont été créés en 2010 lors de la dernière réforme, mais c'est aujourd'hui qu'ils prennent tout leur sens. J'en suis convaincue, l'un des objectifs, c'est de nous mettre en concurrence entre enseignants pour mieux gérer la pénurie.»
Réponse de Pierre Mathiot : «Le tronc commun, qui représente 60 % des heures chaque semaine, ne met absolument pas les disciplines en concurrence. La gestion par les lycées de la dotation horaire globale [l'enveloppe d'heures d'enseignement, ndlr] relève en effet de décisions du proviseur, prises en concertation avec le conseil pédagogique qui est composé de représentants de toutes les disciplines enseignées. Si la réforme permet qu'enfin les acteurs du lycée discutent entre eux de la meilleure manière de s'organiser, ce sera une avancée remarquable. Il n'est pas possible de demander aux recteurs un "cadrage" de ce qui se passe dans tous les lycées, les choses doivent se décider au plus près des réalités.»