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Libération
Edito

Demi-monde

publié le 7 février 2019 à 21h16

Comme dirait Edouard Philippe, on nage en plein bololo. Après avoir empoisonné l’Olympe présidentielle, plaçant Jupiter dans une inconfortable défensive, voilà que le mauvais petit diable Benalla s’introduit dans l’enfer de Matignon. Si l’on a bien compris, la cheffe de sécurité du Premier ministre a reçu chez elle ce M. Alexandre qu’elle n’aurait pas dû recevoir, alors que celui-ci a rencontré, là ou ailleurs, un complice qu’il n’aurait pas dû rencontrer, et qu’ils ont parlé d’un contrat russe qu’ils n’auraient pas dû contracter. Du coup, l’imprudente hôtesse a démissionné de son poste et le Premier ministre, dont elle devait assurer la sécurité, se retrouve dans l’insécurité d’un scandale tentaculaire.

Il apparaît de surcroît que l’encombrant garde du corps, encore en fonction auprès du Président, a fricoté avec un oligarque russe à la douteuse réputation, acoquiné dans cette entreprise avec un homme d’affaires maniaque du selfie plusieurs fois condamné en justice. Où le «nouveau monde» se change brusquement en demi-monde, avec arrangements subreptices, entrevues louches, dialogues compromettants, excès de pouvoir dérangeants et dénégations aussitôt démenties. On va finir par penser que le fondateur d’En marche aurait mieux fait de se fouler la cheville le jour où il s’est entiché de ce maître Jacques de la protection rapprochée aux connexions très éloignées de ce qui sied à un personnage placé au cœur d’un dispositif d’Etat. Emmanuel Macron et Edouard Philippe peuvent exhaler la plainte de ceux dont la confiance a été surprise : gardez-moi de mes gardes du corps, mes ennemis je m’en charge. Il est temps d’éclaircir rapidement, par une mise au point complète, sincère et transparente, cet imbroglio qui jette un doute sur le sérieux avec lequel le personnel de sécurité des deux premiers personnages de l’exécutif a été recruté.