Evénement. Révélations. Moment d'histoire. Enregistrement inédit. A la radio, à la télé et dans la presse écrite (y compris Libération ), les louanges ont plu avant la diffusion, le 3 février sur France 5, du documentaire 1940, les secrets de l'armistice.
«Secrets», parce que le film est réalisé à partir d'une archive présentée comme inédite, un enregistrement sonore des négociations de l'armistice de 1940 qu'Adolf Hitler a fait réaliser à l'insu de la délégation française, et qui était révélé pour la première fois, à en croire les producteurs du documentaire.
La petite histoire de ce grand moment d'histoire est belle. C'est Bruno Ledoux, un promoteur immobilier passionné d'histoire et collectionneur (accessoirement ancien actionnaire de Libé), qui est tombé dans une vente aux enchères à Munich, en 2015, sur des disques de l'enregistrement, que Hitler avait fait copier pour Pétain. Une malle de 45 disques 78 tours… jamais retrouvée depuis la fin de la guerre. Mais s'il s'agit indéniablement d'une trouvaille, l'enregistrement, lui, n'est en réalité pas si inédit.
Il y a quarante ans, le documentaliste d’un journaliste d’Europe 1, Philippe Alfonsi, avait mis la main en Allemagne sur des bandes magnétiques du même enregistrement des négociations. A la fin des années 70, les auditeurs de la station ont ainsi pu, quarante ans avant les téléspectateurs de France 5, en écouter des extraits. Alfonsi récidivera en 1990, cette fois sur France Inter, pour les 50 ans de l’armistice.
Un lecteur de CheckNews nous a même fait savoir qu'en 1995, il avait acheté dans un kiosque le CD Echos de Guerre 1939-41, réalisé avec la BBC et l'INA, et qui proposait aussi, parmi plusieurs documents sur la période, des extraits des fameux enregistrements de 1940. Qui sont donc de moins en moins inédits à mesure qu'on cherche… Interrogé par CheckNews, Emmanuel Amara, le réalisateur du documentaire, assure qu'il ignorait tout de ces émissions et que les spécialistes qu'il a contactés n'en savaient guère plus. Comme quoi, même les historiens peuvent parfois manquer de mémoire.