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Libération
Récit

Antisémitisme : à l'Assemblée, le gouvernement pressé de passer des mots aux actes

La séance de questions au gouvernement a été largement dominée mardi par la lutte contre l'antisémitisme. «Marcher ne suffit plus», disent les partis d'opposition.
A l'Assemblée, le 19 février. (JACQUES DEMARTHON/Photo Jacques Demarthon. AFP)
publié le 19 février 2019 à 18h41

«Une fois de plus, une fois de trop.» Le président de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand, a ouvert mardi la séance de questions au gouvernement en dénonçant l'«ignoble profanation» du cimetière juif de Quatzenheim en Alsace, dernier épisode d'«une vague d'actes antisémites sans précédent». Depuis le perchoir, il annonce que les débats parlementaires seront exceptionnellement levés à 18h30 afin de permettre aux députés de se joindre au rassemblement place de la République. L'hémicycle debout applaudit au diapason. Mais au-delà de l'image d'une condamnation unanime, que faire après cette marche ? C'est la question posée au gouvernement sur tous les bancs. «Après chaque drame, nous nous sommes indignés», note François Pupponi (groupe «Libertés et Territoires») mais «la situation ne fait qu'empirer». Le député du Val-d'Oise, ancien maire de Sarcelles où une synagogue a été visée par des tirs de carabine à plombs vendredi, en appelle à un «sursaut de lucidité pour sauver les juifs de France et donc pour sauver la France et la République». «Notre législation n'est plus adaptée», estime François Pupponi, affirmant que «la haine du juif et la haine d'Israël sont intimement liées, cette haine porte le même nom : l'antisémitisme».

«La France doit se retrouver dans l’action»

Dans sa question, la présidente du groupe socialiste Valérie Rabault formule trois demandes : la poursuite systématique des actes antisémites, la création d'une mission parlementaire permanente sur l'antisémitisme et une action pour que «notre droit cesse d'être bafoué sur les réseaux sociaux». «Ce soir, la France se retrouve à la République, demain elle doit se retrouver dans l'action», plaide la députée du Tarn-et-Garonne. De son côté, Constance Le Grip (LR) appelle le gouvernement au «courage» : elle réclame des mesures «contre l'antisémitisme qui trouve son terreau dans l'islamisme» en rappelant que l'un des agresseurs d'Alain Finkielkraut samedi appartenait à cette mouvance. La députée LREM Laetitia Avia qui a remis à l'automne un rapport sur la lutte contre le racisme et l'antisémitisme sur Internet détaille ses propositions : retrait des propos haineux sous 24 heures, procédure de signalement simplifiée pour les victimes, etc.

«C’est l’affaire de tous, c’est l’évidence» 

Interpellé par le député UDI franco-israélien Meyer Habib, pour qui «l'antisionisme est la forme réinventée de l'antisémitisme», le secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Intérieur Laurent Nuñez redonne une fois de plus la position du gouvernement : il n'est «pas nécessaire de pénaliser l'antisionisme». Le député LREM Sylvain Maillard, qui porte cette proposition depuis 48 heures, appréciera. «L'antisémitisme exige l'union sacrée des responsables politiques et de nos concitoyens», affirme Edouard Philippe mais le Premier ministre en convient : «Dénoncer, se rassembler, marcher ne suffit pas.» L'exécutif veut donc «améliorer [son] niveau de réaction» et «responsabiliser ceux qui pensent qu'"au fond ce n'est pas si grave"». Cela passe, entre autres, par une meilleure formation des agents publics, magistrats et forces de l'ordre, qui «contribuent à l'identification et à la sanction de ces actes», et des enseignants souvent pris au dépourvu face à des réactions antisémites de leurs élèves. «L'antisémitisme prend des formes incroyablement variées : je ne suis pas sûr que nous puissions dire qu'il serait l'apanage de tel ou tel. Je crains malheureusement qu'il soit largement partagé, souligne Edouard Philippe. La lutte contre l'antisémitisme est l'affaire de tous, c'est l'évidence.»