Une période étrange. A gauche, les listes se multiplient et les figures changent d’écurie du jour au lendemain. Lundi, c’était au tour d’Aurore Lalucq, économiste et porte-parole de Génération·s, le mouvement de Benoît Hamon. Elle a décidé de rejoindre de Raphaël Glucksmann et sa liste en «dynamique» pour rassembler la gauche, dit-elle. Un choix qui ne fait pas plaisir chez Hamon, où on l’explique par l’ambition de l’intéressée. «Les conditions qu’elle posait, notamment une deuxième place sur la liste, ne pouvaient être remplies.» L’intéressée dément.
Vous ne serez donc pas sur la liste Génération·s ?
Vendredi, j’ai envoyé un message à Benoît Hamon, Guillaume Balas et Benjamin Lucas pour leur annoncer mon retrait car j’ai renoncé à être sur la liste.
Pourquoi ?
Je ne me voyais pas faire campagne avec cette stratégie de désunion, je ne me suis pas lancée en politique pour ça. La désunion me pèse, m’empêche de dormir. Pour moi, le choix n’est pas simple. Benoît Hamon est une personne que je respecte énormément, j’étais avec lui lors de la présidentielle, lors de son départ du PS pour fonder Génération·s. J’étais présente, je n’ai jamais lâché… Désormais, c’est différent.
Qu’est-ce qui est différent ?
Je ne supporte plus de participer à cette ambiance où chacun tape sur le copain. Où chacun se voit plus rouge ou plus vert que son voisin et oublie que ceux contre lesquels nous devons nous battre, ce sont la droite et l’extrême droite. Je veux que la gauche et les écologistes se rassemblent pour faire un beau score aux européennes. Il n’y a presque aucune différence entre les idées de Jadot, Hamon et Glucksmann… c’est invraisemblable et pas à la hauteur de l’enjeu.
Vous allez faire quoi ?
Je rejoins la campagne de Place publique, aux côtés de Raphaël Glucksmann et Claire Nouvian.
Vous serez sur la liste ?
Je ne sais pas.
Mais c’est quoi la différence entre Génération·s et Place publique ?
Sur le fond ? Aucune. Alors quelle différence ? La liste portée par Raphaël Glucksmann et Claire Nouvian engendre une dynamique de rassemblement. Cela change tout.
En dynamique avec le PS…
Oui, le PS mais pas uniquement. Ce sont Glucksmann et Nouvian, qui portent la liste, qui l’ont lancée, et le PS est derrière. De ma vie, je n’ai jamais voté PS, jamais - sauf pour Hamon en 2017 -, mais ce qui se passe aujourd’hui est important, les socialistes bougent, ils font un pas vers nous, ce n’est pas rien. Et pour la première fois, ils laissent leur tête de liste à une personne qui n’est pas de chez eux et qui aurait pu être chez Génération·s. Nous devons entendre ce message.
Vous comprenez les réticences de Hamon à travailler avec son ex-parti ?
Je les comprends. Mais cet espace politique se recompose, donc je me dis que nous devons tout faire pour maintenir le pluralisme de la gauche en vie. Si personne à gauche ne dépasse les 5 % aux européennes, que se passera-t-il après ? On ne pourra pas reconstruire sur un champ de ruines. Alors on explique quoi aux militants ? Moi, j’ai besoin de leur dire en face ce que je pense : il faut passer par le rassemblement pour pouvoir porter au mieux nos idées. J’espère qu’ils comprendront.
Dans quel groupe siégerez-vous à Strasbourg ?
Encore faudrait-il que je sois sur une liste ! Quoi qu’il en soit, je ne siégerai pas avec les socialistes au Parlement européen. Mais ce n’est pas le plus important aujourd’hui. Rassemblons-nous et nous discuterons des groupes dans un second temps. Si on arrive à faire campagne avec toute la gauche et les écologistes, je suis sûre que nous trouverons la meilleure solution pour siéger tous ensemble.