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Ramadan crée la polémique à une conférence sur les violences aux femmes

Soupçonné de viols en France et en Suisse, l'intellectuel a assisté lundi soir à une réunion publique à Saint-Denis sur les violences faites aux femmes, provoquant la colère de plusieurs participants.
Tariq Ramadan, en 2016 à Bordeaux. (Photo Mehdi Fedouach. AFP)
publié le 19 mars 2019 à 17h15

Le prédicateur musulman Tariq Ramadan a toujours fait preuve d’un art consommé de la communication. Et de la provocation. Dernière preuve en date, lundi soir : le théologien, soupçonné de plusieurs viols en France et en Suisse, a assisté à l’hôtel de ville de Saint-Denis à une conférence publique sur le thème «Lutter contre les violences faites aux femmes au quotidien».

«Il s'est installé dans l'assistance, raconte à Libération Raphaël Perrin, l'attaché de presse de la municipalité de Saint-Denis, organisatrice de la manifestation. Plusieurs personnes l'ont immédiatement reconnu.» D'après un témoin, sa fille aînée Maryam, qui l'a toujours défendu, l'accompagnait. Libéré à la mi-novembre après neuf mois et demi de détention provisoire à l'hôpital pénitentiaire de Fresnes (Val-de-Marne), Tariq Ramadan n'était pas apparu en public depuis lors.

Protestations

Sa présence a suscité la colère d'une partie de l'assemblée, selon la mairie. Plusieurs femmes ont demandé à Tariq Ramadan de quitter les lieux. L'élue écologiste Sonia Pignot, animatrice du débat, lui a également signifié publiquement que sa présence n'était pas la bienvenue. «Il n'est pas possible de faire sortir par la contrainte physique un participant à une conférence publique», a précisé la municipalité dans un communiqué qualifiant la présence du théologien de «totalement inacceptable». Ajoutant que «rien ne peut justifier qu'un combat aussi important que celui de la lutte contre les violences faites aux femmes soit ainsi parasité et confisqué par de telles provocations.»

«Tariq Ramadan est demeuré silencieux, précise Raphaël Perrin. C'est sa fille qui a répondu que rien ne les empêchait d'assister à la conférence et que son père n'avait pas été condamné par la justice.» Les organisateurs ont songé un instant à annuler la manifestation mais le débat a finalement eu lieu. Selon des témoins, Tariq Ramadan et sa fille se seraient éclipsés une quarantaine de minutes après le début des discussions.

Pure provocation

«C'est de la pure provocation, ce qui ne serait pas une première le concernant, dit à Libération Me Eric Morain, l'avocat de «Christelle», la deuxième femme à avoir porté plainte pour viol contre Tariq Ramadan. Je préfère y voir une sorte d'aveu, comme quelqu'un qui irait à une réunion d'alcooliques anonymes.»

Contacté par Libération, l'entourage du prédicateur n'a pas donné suite à nos demandes. Depuis sa remise en liberté, Tariq Ramadan est sous le coup d'un contrôle judiciaire très strict. Il a versé une caution de 300 000 euros, a l'obligation de pointer une fois par semaine au commissariat et l'interdiction de quitter le territoire français.

Depuis de nombreuses années, le théologien dispose de bureaux et d’un appartement à Saint-Denis, adresse à laquelle il est domicilié en France. A l’automne 2017, il a fait l’acquisition d’un duplex sur la butte Montmartre à Paris. Depuis le début 2019, il résiderait régulièrement, selon des sources proches de son entourage, dans la région de Chambéry, non loin de la frontière suisse et italienne.