Cette fois, le ministre de l'Education, Jean-Michel Blanquer, écrit aux directeurs d'école pour tenter de calmer la fronde. La pression doit monter rue de Grenelle, alors que le mouvement de grève, prévu ce jeudi, s'annonce très suivi, notamment dans le primaire.
A Paris, les syndicats annoncent près de 70% d'enseignants grévistes dans le primaire. Le Sgen-CFDT (syndicat minoritaire) a cartographié les écoles mobilisées. Les prévisions de grève à l'échelle nationale ne sont pas encore connues. Lors de la dernière journée de grève, le 19 mars, 40% des instits étaient mobilisés selon les syndicats, 25% selon le décompte du ministère.
Des mots doux pour rassurer
Dans la lettre, envoyée dans les boîtes mails des directeurs d'école mardi, Jean-Michel Blanquer attaque par des mots doux : «Vous êtes des acteurs essentiels de notre école primaire. Vous et vos prédécesseurs en avez façonné l'histoire et vous êtes son avenir.»
Quelques paragraphes plus loin, il rentre dans le vif : son projet de loi pour une école de la confiance, qui suscite beaucoup d'inquiétudes, à commencer par cette mesure, arrivée au dernier moment par voie d'amendement, qui doit permettre de regrouper des écoles primaires avec des collèges. «Des mesures de la loi ont été caricaturées ou ont donné lieu à des erreurs d'interprétation, écrit le ministre. C'est le cas de l'établissement des savoirs fondamentaux qui correspond à une idée ancienne de lien accentué entre l'école et le collège, déjà expérimentée avec succès dans plusieurs territoires. Ce dispositif n'est qu'un outil supplémentaire pour ceux qui le désireront.» Sauf que dans la version actuelle du texte, il n'est pas écrit que l'accord de l'équipe pédagogique est nécessaire… Le ministre, dans sa lettre : «J'ai clairement indiqué à l'Assemblée nationale que le dispositif sera fondé sur le volontariat. Nous le préciserons encore à l'occasion du passage au Sénat.» Faut-il comprendre que cette mention figurera dans le texte de loi ?
Un test pour Blanquer
Jusqu'ici, le ministre Jean-Michel Blanquer n'avait pas connu de réelle opposition, donnant l'impression de se balader sur un boulevard. Mais la partie semble se corser. Le mouvement interprofessionnel dans la fonction publique du 19 mars a été très suivi par les profs. La journée de mobilisation, samedi dernier, aussi : 36 000 personnes étaient dans les rues. La veille, le ministre avait envoyé un courrier à l'ensemble des profs. «Vous êtes les premiers acteurs des politiques scolaires qui se situent à l'avant-garde du progrès social. A ce titre, tous les Français vous doivent gratitude et respect.» L'effet apaisant recherché n'a pas fonctionné.
A Paris par exemple, le cortège, composé de profs et de parents, était très fourni. Les revendications nombreuses : les inquiétudes autour de ce projet de loi fourre-tout sur l'école de la confiance, la réforme du lycée, Parcoursup… Depuis des mois, des professeurs de lycée se mobilisent un peu partout, très inquiets du creuset des inégalités avec cette double réforme… Ils préféraient jusqu'ici des modes d'actions originaux (autre que la grève classique) mais galèrent à trouver un écho. Rien ne change, le ministre ne les entend pas. Beaucoup d'entre eux pourraient donc se mettre en grève ce jeudi. Pareil pour les profs de collèges, dépités par la baisse des moyens. Dans beaucoup de collèges, la rentrée se prépare avec moins d'heures d'enseignement, donc moins de possibilités de faire cours en petit groupe par exemple.