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Libération

Des pédopsychiatres en surmenage

publié le 22 avril 2019 à 21h06

Ils aiment leur boulot et le font bien, avec engagement et hospitalité. Et ce n'est pas rien dans ce XIXe arrondissement de Paris où les difficultés sociales, économiques et culturelles des habitants sont légion. Mais mercredi, ils ont appuyé sur «pause». Avenue de Flandre, ils se sont rassemblés à l'entrée du centre médico-psychologique (CMP). «Nous, soignantes et soignants de la pédopsychiatrie publique du XIXe arrondissement de Paris, sommes de nouveau en grève», est-il écrit sur une banderole.

Sur la planète de la santé mentale, la pédopsychiatrie, on le sait, est au bout du rouleau : manque de moyens, manque de postes, et une administration de la santé qui a du mal à intégrer le fait qu'en la matière, «ce qui compte, c'est le temps et le lien». Cette équipe du XIXe croule sous le travail. En vingt ans, la population de l'arrondissement a augmenté de 20 %, les difficultés sociales se sont aggravées en proportion. Et la demande a explosé. Dans les trois centres médico-psychologiques du secteur, le temps d'attente pour un premier rendez-vous varie entre trois mois et un an pour des adolescents. Dans le centre de l'avenue de Flandre, 140 enfants sont sur une liste d'attente. «Dans notre quartier, les familles n'ont pas d'argent pour aller dans le libéral, explique une infirmière. Alors tout s'aggrave.» La cheffe de service, Catherine Zitoun, raconte les difficultés quasi insurmontables pour trouver un lit, en l'occurrence pour une fille de 13 ans violente, suicidaire. «La demande a été faite en septembre, peut-être qu'en mai elle aura un lit.»

Au CMP de l'avenue de Flandre, trois psychiatres travaillaient avant, il n'y en a plus qu'un. Les postes d'orthophonistes ? Il y avait deux temps pleins, il n'y en a en plus qu'un, et il en manque désormais trois sur l'ensemble du secteur. «J'ai connu un burn-out, reconnaît une psychiatre, tant la pression est forte et le temps nous manque.» Une infirmière constate : «On pourrait ouvrir un CMP en face, en quelques jours il serait aussitôt plein.» «Mais le problème, insiste une psychologue, c'est que tout se délite. Pour les jeunes enfants, on n'a ni le temps ni la place. Et on voit des enfants si jeunes, dès la sortie de la crèche, qui vont bien mal.» Devant ces difficultés, une psychologue remarque avec tristesse : «Plutôt que de nous aider, que fait la direction ? Une baisse des budgets de formation de 50 %. On nous a mis un agenda électronique où l'on a l'impression d'être surveillés.»