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Libération

Confronté à la chute des constructions, l’exécutif allège la facture des HLM

publié le 24 avril 2019 à 20h36

Facture un peu allégée pour les bailleurs sociaux. Après deux rencontres avec le Premier ministre Edouard Philippe à Matignon, le monde des HLM et le gouvernement sont parvenus à une sorte de compromis qui acte le montant des efforts financiers qui vont être demandés aux organismes HLM dans les trois prochaines années. La facture à payer pour eux sera de l'ordre de 1,4 milliard d'euros par an entre 2020 et 2022. Mercredi, lors d'un comité exécutif extraordinaire, l'Union sociale pour l'habitat (USH, qui fédère tous les organismes de HLM qui logent 4,5 millions de ménages) a «approuvé à la majorité» l'accord. C'est toujours mieux qu'en 2018, quand les HLM avaient dû débourser 1,7 milliard.

Cette somme considérable a servi à compenser la baisse des allocations logement (APL) décidée par le gouvernement pour les locataires du parc social. Objectif : réduire le déficit public. Mais pour éviter que cette mesure ne les pénalise (du fait de la baisse des APL, le solde de leur loyer restant à payer aurait augmenté), les bailleurs sociaux ont été contraints de compenser. Ils ont dû baisser leurs loyers de 900 millions d'euros et leur taux de TVA sur la construction et les travaux a été relevé de 5,5 % à 10 % pour un coût de 800 millions. «Prendre 1,7 milliard dans nos caisses, c'est totalement "destroy" pour notre modèle économique, dénonçait le 21 mars Marcel Rogemont, ex-député PS et président de la Fédération des offices publics de l'habitat, à l'issue de sa première rencontre à Matignon. Un tel prélèvement bouffe les trois quarts de la marge des organismes, qui est de l'ordre de 2,4 milliards par an.» Un mois plus tard, l'homme est toujours en colère. «La Fédération juge moralement indigne de faire payer aux locataires HLM la baisse des APL. Car l'argent des bailleurs sociaux vient des loyers payés par les habitants des logements sociaux.»

Le compromis a le mérite de cadrer les choses pour les trois prochaines années. «Il donne une visibilité aux organismes», même s'ils devront passer à la caisse. Car dans les projets initiaux du gouvernement, il était carrément question de faire passer l'effort demandé aux HLM à 2,5 milliards par an entre 2020 et 2022. Des sommes qui auraient fait plonger dans le rouge de nombreux organismes. C'est la dégradation rapide des indicateurs relatifs au logement neuf qui a incité le gouvernement à revoir sa position. En 2018, le nombre de mises en chantier a chuté de 7 %. Même recul de 7 % des permis de construire qui augurent des constructions à venir. Outre que cette baisse est malvenue alors qu'on manque de logements dans les grandes agglomérations, le secteur du BTP qui tire l'économie fait grise mine. Car le siphonnage des fonds propres des HLM a entraîné une baisse de la construction de logements sociaux, mais aussi privés. Explication : lorsque les promoteurs lancent un projet, les HLM achètent un quota de l'ordre de 25 %. Ces acquisitions en bloc permettent aux promoteurs de lancer leurs programmes en attendant de vendre les autres logements sur plan et à l'unité à des particuliers. Faute d'acquisitions par les bailleurs sociaux, de nombreux projets privés restent en souffrance.