Auchan se sépare de 21 sites en France, dont 13 supermarchés. 723 emplois sont menacés, selon la CFDT. L'annonce est retentissante et touche le cœur du métier : les magasins. En 2017, un «plan de sauvegarde de l'emploi» (PSE) avait concerné 400 postes, mais uniquement à la centrale d'achat, dans les fonctions administratives. Elle est à la mesure des résultats 2018, «très mauvais», dixit Franck Geretzhuber, secrétaire général d'Auchan Retail France, avec 44,1% de baisse des bénéfices avant impôts (EBITDA) et une perte nette d'1 milliard d'euros.
«Nécessaire confidentialité»
Symbole du déclin d'un modèle de consommation, un hypermarché, celui de Villetaneuse, en Seine-Saint-Denis, va mettre la clé sous la porte. «Non, ce ne sont pas des fermetures, mais un plan de cession», rétorque la direction d'Auchan. Franck Geretzhuber s'emploie à éloigner le spectre de licenciements massifs : «Nous recherchons des repreneurs pour chaque site, et les discussions sont déjà engagées. L'avantage d'une cession par rapport à une fermeture, c'est que le repreneur reprend le fonds de commerce et les collaborateurs.» Donc pas de licenciements, en tout cas dans les premiers temps. D'autres enseignes de la famille Mulliez, propriétaire d'Auchan, seraient-elles sur les rangs, comme Decathlon, Leroy-Merlin ou Boulanger ? Silence radio sur ce point, Franck Geretzhuber s'abritant derrière la «nécessaire confidentialité» de ces négociations.
Ce qui est sûr, c'est que ces enseignes spécialisées s'apprêtent à ouvrir des «corners» dans les hypers Auchan, sur le modèle de ce qui se pratique depuis des années aux Galeries Lafayette ou au Printemps, dans le cadre du plan de redressement nommé «Renaissance». Franck Geretzhuber exclut toute réduction de surface des hypermarchés, au contraire de ce que pratiquent aujourd'hui Carrefour et Casino, confrontés aux mêmes difficultés. Au cas où un magasin ne trouverait pas repreneur, Franck Geretzhuber le promet, les reclassements en interne, dans d'autres Auchan se situant à proximité, seront la priorité de la direction.
«Errances stratégiques»
La CFDT, de son côté, s'indigne dans un communiqué de presse : «Ce PSE intervient après des années d'errances stratégiques et alors qu'Auchan et le groupe Mulliez ont perçu au titre du CICE (crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi) 500 millions d'euros sur les six dernières années, ce qui est d'autant plus inacceptable.» Et profite de l'occasion pour remettre sur le tapis une vieille demande : que l'Association familiale Mulliez soit reconnue comme une entité économique et sociale unique, avec toute sa galaxie de magasins, «souvent sur les mêmes zones commerciales», note le communiqué. Outre Decathlon, Leroy-Merlin ou Boulanger, les Mulliez, c'est aussi Kiabi, Kiloutou, Flunch, Norauto, Cultura et on en passe. Ce qui ouvrirait la porte à des possibilités de reclassement plus large, sur l'ensemble des magasins dans le giron de cet actionnariat familial, qui fuit les cotations en bourse.
Franck Geretzhuber soupire : «Il n'y a pas besoin d'agiter le chiffon rouge. Nous sommes des entreprises qui nous connaissons, et les syndicats savent bien qu'en cas de reclassement externe, c'est à elles que nous adressons nos salariés.» En bonne entente familiale, mais sans obligation.