Jennifer Mbon ne veut pas se laisser faire. La jeune femme de 23 ans, assignée ce jeudi en référé à Marseille par son ancien propriétaire, André Malrait, l’adjoint au maire en charge du patrimoine, aurait bien aimé que l’élu «s’excuse» de lui avoir loué un studio épinglé par les services d’hygiène comme en «état d’insalubrité». «Je suis dans mon droit, martèle-t-elle. Je veux qu’il me rende mes sous !»
A l’origine de la procédure, c’est l’élu-propriétaire qui avait entamé une procédure de résiliation-expulsion à l’encontre de sa locataire, coupable de n’avoir pas payé deux mois de loyer. Confrontée aux moisissures qui avaient envahi son studio au fil des mois, faute de système d’aération efficace, la jeune femme avait en effet fini par refuser de payer ses 520 euros de loyer. Après l’avoir relancé par courrier – avec en-tête de la ville – André Malrait avait finalement saisi la justice pour obtenir gain de cause… avant de se désister de la procédure, la presse ayant révélé l’état insalubre du logement loué.
Pas question d'en rester là pour Julie Savi, l'avocate de Jennifer Mbon, qui réclame 4 000 euros de dommages et intérêts pour sa cliente, soulignant que les affaires de cette dernière avaient été entièrement détruites par l'humidité. Surtout, l'avocate demande que le dossier soit jugé au fond, pointant de «nombreuses irrégularités» sur le bail. Car la presse a aussi révélé que le petit studio, «en réalité un couloir de 2,50 mètres de large», pointe l'avocate, avait initialement été déclaré comme «garage à deux-roues». La situation du logement avait finalement été régularisée en juillet 2018, soit après la signature du bail par Jennifer Mbon, ce qui questionne la légalité du document, selon l'avocate.
«On ne plaide pas le dossier, on vous fait le procès d’un élu, ce qui n’a rien à voir», a rétorqué Pascale Barton-Smith, l’avocate d’André Malrait. Selon elle, la locataire, «qui ne payait pas ses loyers», a utilisé «tous les moyens pour mettre à terre son propriétaire». «Qui a subi un préjudice, poursuit-elle, la locataire ou Monsieur Malrait, un homme de 87 ans qui se voit sali quotidiennement dans la presse, sous couvert d’un amalgame indigne avec le drame de la rue d’Aubagne ?» Quant aux irrégularités du bail pointées par la partie adverse, une simple question «administrative», évacue l’avocate. «La locataire a pris possession d’un local d’habitation, le changement d’affectation n’est pas obligatoire, assure-t-elle. Elle a visité, elle a signé, elle était très contente, donc il est malvenu d’en contester aujourd’hui la légalité.» Et de maintenir sa demande d’abandon de la procédure sans aller jusqu’au juge du fond, ainsi que le paiement des frais d’avocat d’André Malrait, qui s’élève à 1 500 euros. A l’issue de l’audience, Jennifer Mbon ne cachait pas son amertume. «Il dit que je veux retourner la situation en ma faveur alors que je suis dans mon droit !» déplore-t-elle. Le jugement a été mis en délibéré au 6 juin.