Benoît Hamon n'y va pas par quatre chemins : «Si le mensonge est avéré, je ne vois pas comment Christophe Castaner peut rester.» Après vingt-quatre heures de polémique autour de ce qui s'est passé à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, l'ex-candidat à la présidentielle résume : «Au minimum, le ministre de l'Intérieur a exagéré. Au pire, il a menti» en dénonçant une «attaque» délibérée de l'établissement hospitalier. «Cela relève d'une dérive autoritaire dont il est l'un des exécutants», ajoute le patron de Génération·s, pour qui «le gouvernement cherche à disqualifier par tous les moyens les mouvements sociaux.»
Mercredi soir, l'emballement commence à 21 h 04 par un tweet sans nuance du ministre de l'Intérieur : «Ici, à la Pitié-Salpêtrière, on a attaqué un hôpital. On a agressé son personnel soignant. Et on a blessé un policier mobilisé pour le protéger. Indéfectible soutien à nos forces de l'ordre : elles sont la fierté de la République», affirme alors Castaner. Son message en 280 signes agit comme un feu vert pour une partie du gouvernement. «On voudrait ne pas y croire. On voudrait se dire que la violence ne peut pas tout prendre pour cible. S'en prendre à un hôpital est inqualifiable», fustige dans la foulée la ministre de la Santé, Agnès Buzyn. Jeudi matin, l'heure est toujours à l'indignation, pas encore à la prudence. En déplacement en Charente, le Premier ministre demande «à chacun de mesurer la gravité des faits», qui commencent à être remis en question par certains médias.
Comme le ministre de l'Intérieur, Edouard Philippe met sur le même plan ce qui s'est passé à l'hôpital et devant le commissariat du XIIIe arrondissement de Paris quelques minutes avant : «Caillasser un commissariat et vouloir s'introduire dans un hôpital, fondamentalement c'est remettre en cause des services publics.» Le virage sur l'aile démarre avec Agnès Buzyn, après sa rencontre avec le personnel soignant de la Pitié. Plus question d'attaque mais «d'intrusion ou de tentative d'intrusion». Le ton de l'exécutif baisse d'un cran : «il n'y a pas de preuve aujourd'hui» de vandalisme, explique la ministre.
Mais dans l'opposition, la charge a été sonnée dès les premières heures de jeudi. La députée La France insoumise Danielle Obono avertit sur Sud Radio : «Certains ont manqué de recul en relayant tout de suite des termes très forts, comme l'attaque d'un hôpital. Halte aux exagérations, la situation est peut-être un peu plus confuse.» Jean-Luc Mélenchon embraie, en prenant moins de gants : «Il y a un an les mensonges de Benalla. Cette année : le mensonge de Castaner sur la pseudo-attaque de la Pitié-Salpêtrière.» Un mensonge «effronté», renchérit la tête de liste communiste pour les élections européennes, Ian Brossat.
A droite, la tendance a d'abord plutôt été à la condamnation des supposés casseurs. «Ceux qui ont participé à ce mouvement, ils doivent être traduits devant les tribunaux et sanctionnés», réclame ainsi le député RN Nicolas Bay. «Totalement criminel», tranche de son côté Laurence Sailliet, porte-parole LR. Il faut attendre la fin de la journée pour que son coreligionnaire Bruno Retailleau enclenche la marche arrière. «Le ministre de l'Intérieur doit cesser de mettre de l'huile sur le feu et doit maintenant s'expliquer sur ses déclarations démenties par les faits», affirme ainsi le sénateur sur Twitter. En fin de journée, Florian Philippot dégaine une série de tweets dénonçant un «mensonge d'Etat», avant de conclure : «Quelle est la sanction prévue par la loi anti-fake news ? La démission non ?»