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Libération
Récit

Rue d'Aubagne : les familles face à «une procédure très longue»

Effondrements de la rue d'Aubagne à Marseilledossier
Malgré la «diligence» du juge d’instruction, saluée par un avocat, l’enquête judiciaire risque de durer des années.
Rue d'Aubagne à Marseille, le 5 décembre 2018. (Photo Gérard Julien. AFP)
par Stéphanie Harounyan, correspondante à Marseille
publié le 3 mai 2019 à 20h26

Est-ce la faute à la pluie, comme l’avait suggéré la municipalité au lendemain du drame, si les immeubles de la rue d’Aubagne se sont écroulés ? Depuis l’ouverture, fin novembre, d’une information judiciaire contre X pour «homicides involontaires» aggravés par «violation manifestement délibérée d’une obligation de prudence ou de sécurité», l’enquête progresse toujours sur le terrain des expertises. Le pôle de juges d’instruction piloté par Matthieu Grand a déjà reçu un premier rapport d’architecte portant sur l’historique des deux bâtiments effondrés, les numéros 63 et 65 de la rue d’Aubagne.

Si, dès fin novembre, les experts avaient pointé les défaillances du sol, potentiellement gorgé d'eau en raison de «canalisations rompues» ou d'eaux de ruissellement mal canalisées, ce travail d'historique permettra surtout, au-delà des causes, de remonter la chaîne des responsabilités humaines. «Ce n'est pas tant la cause des effondrements qui compte, mais qui aurait pu les éviter, relève Brice Grazzini, l'avocat de la famille d'une des victimes. Il est possible qu'il y ait énormément de raisons. Mais étaient-elles connues ? Aurait-on pu faire des travaux ? Pouvait-on empêcher la catastrophe ?» Pour David Metaxas, l'avocat du frère d'une locataire décédée dans l'effondrement, il est «aussi question d'instruire sur les conditions d'exploitation de ces immeubles et de leur dégradation progressive au vu et au su de tous les services compétents».

Les familles qui se sont constituées parties civiles ont été reçues longuement par les juges, qui leur ont expliqué la suite de la procédure. Un nouveau rapport d'expertise va être réalisé par un ingénieur et un architecte, choisis hors de Marseille afin de garantir une approche la plus objective possible. «Puis il y aura des contre-expertises, tout le monde va se renvoyer la balle. Ce sont des contentieux très compliqués, impliquant des responsabilités en cascade. On est dans une procédure très longue, qui va probablement durer plusieurs années», souligne Me Grazzini, qui pointe toutefois la «diligence et la très grande attention envers les familles» du juge d'instruction, dont le pôle se consacre quasi exclusivement à l'enquête.

De leurs côtés, la centaine d’enquêteurs de la PJ mobilisés après le drame planchent toujours sur les quelque 400 PV d’auditions récoltés auprès des différentes parties - agents municipaux et élus, experts, syndics, propriétaires… - ainsi que sur les documents saisis lors de la cinquantaine de perquisitions menées au cours de l’enquête. De nouvelles auditions seraient prévues en mai. Avec, peut-être, les premières mises en examen ?