Dix mois que cette proposition de loi était gelée sur ordre du gouvernement. La proposition «visant à renforcer l'accompagnement des jeunes majeurs» confiés à l'Aide sociale à l'enfance (ASE) sera enfin débattue, ce lundi, à l'Assemblée nationale. Si la députée à l'initiative, Brigitte Bourguignon (LREM), a gagné le premier bras de fer, l'épreuve de force est loin d'être terminée : l'article 1er, qui prévoit d'obliger les départements à étendre la prise en charge des enfants placés jusqu'à leurs 21 ans (et non leurs 18 ans), est jugé trop audacieux par l'exécutif. Et risque de passer à la trappe.
De quoi parle-t-on ?
Environ 300 000 enfants bénéficient en France d’une mesure de protection de l’enfance et grandissent dans un foyer ou une famille d’accueil. Mais le jour de leurs 18 ans, ils se retrouvent brutalement sans hébergement, sans argent et sans accompagnement. Chaque année, 21 000 jeunes majeurs sont concernés par ces «sorties sèches». Un dispositif permettant d’assurer leur protection jusqu’à 21 ans existe depuis 1975 : les contrats jeune majeur (CJM). Facultatifs, au bon vouloir de chaque département, ils ne sont que trop rarement accordés.
«Sans soutien de la collectivité, ces jeunes les plus fragiles se voient contraints de faire appel au numéro d'urgence 115 ou aux dispositifs d'hébergement d'urgence», peut-on lire dans l'exposé des motifs de la proposition de loi. Selon l'Institut national d'études démographiques, 23 % des sans-abri nés en France sont d'anciens enfants placés.
Que prévoit la proposition de loi ?
Signé par près de 160 députés LREM et adopté l'été dernier par la commission des affaires sociales, le texte compte 10 articles, dont une mesure phare : le droit pour tous les ex-enfants placés d'obtenir un contrat jeune majeur. Objectif : améliorer la situation de ces jeunes à qui l'Etat demande «d'être autonomes bien plus tôt que les autres».
L'article 1er veut rendre obligatoire la prise en charge des majeurs de moins de 21 ans par les services de l'ASE. «Les dépenses nouvelles liées à la mise en place de l'article 1er seraient prises en charge par l'Etat», est-il précisé. Autre mesure prévue : disjoindre « la fin de l'accompagnement de la date d'anniversaire du jeune » pour qu'il puisse terminer le cycle scolaire ou universitaire engagé.
Pourquoi l’exécutif freine ?
Le gouvernement serait contre le caractère obligatoire de l'article 1er et semble préférer l'option «contractualisation» avec les départements plutôt que la coercition. «Une mauvaise solution qui n'encouragera que les conseils départementaux déjà vertueux sur cette problématique», alerte le collectif Cause majeur.