Voté mercredi par les sénateurs dans le cadre du projet de loi sur l’école de la confiance, l’amendement 100 - pas définitif - prévoit d’interdire le port de signes religieux aux parents accompagnateurs des sorties scolaires. Le rapporteur général de l’Observatoire de la laïcité, Nicolas Cadène, remet la mesure dans son contexte
Que prévoit le droit aujourd’hui ?
Dans l’état actuel des textes, seules les personnes qui exercent une mission de service public sont tenues au devoir de neutralité. Mais cela ne concerne pas les parents d’élèves accompagnateurs.
Pourtant, les sénateurs, à l’origine de l’amendement, disent avoir voulu combler un vide juridique…
De fait, non, il n’y a pas de vide juridique. Le Conseil d’Etat a été très explicite dans son étude du 19 décembre 2013. Il est précisé que les parents accompagnateurs, bénévoles, ne sont pas soumis à la neutralité. Deux exceptions : la perturbation au bon fonctionnement de la sortie scolaire, ou un trouble à l’ordre public.
Dans l’exposé des motifs, les sénateurs revendiquent que «le temps scolaire doit demeurer un espace où aucun signe religieux ostentatoire ne doit être exposé aux élèves». Qu’en dites-vous ?
Cette formulation surprend, notamment l'emploi du terme «ostentatoire» qui a été confondu, de toute évidence, avec «ostensible». Le sens juridique n'est pas du tout le même. Comme l'a rappelé le Conseil d'Etat, «ostentatoire» suppose que le port du signe religieux soit accompagné d'un comportement prosélyte, et donc de paroles, écrits ou actes. Ce qui, de fait, est déjà interdit à l'école et pour les parents accompagnateurs de sorties scolaires. En l'occurrence, les sénateurs à l'origine de cet amendement cherchent à interdire le simple fait de porter un signe religieux «visible» au-delà de tout prosélytisme.
Dans l’hémicycle, l’opposition sénatoriale s’est élevée contre une mesure idéologique créant des problèmes là où il n’y en a pas. Et surtout, de nature à fragiliser les enfants de quartiers défavorisés…
Comme cela a été dit par des sénateurs, en raison d’une insuffisante mixité sociale, la crainte peut être émise que cette mesure législative, si elle était adoptée, aboutisse à quasiment priver ces établissements de sorties scolaires.