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Libération
Récit

Chez Les Républicains, Wauquiez en ligne de mire

Le président du parti, et son acharnement à vouloir recentrer la droite sur ses «valeurs», fait l’objet d’un tir nourri de la part de caciques de LR, qui lui imputent le score calamiteux de dimanche.
Après l’annonce des résultats, dimanche soir, au siège du parti Les Républicains, rue de Vaugirard à Paris. (Photo Alain Guilhot)
publié le 27 mai 2019 à 20h16

Les premières salves sont parties au petit matin, tirées par Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France. La cible ? Laurent Wauquiez, le président de Les Républicains, dont les jours à la tête du parti semblaient comptés au lendemain du score le plus calamiteux réalisé par la droite à une élection : seulement 8,48 % des voix et une humiliante quatrième place, loin derrière les écolos. La présidente de «Libres !», mouvement qui est associé à LR, a donc expliqué que, «à la place» de Wauquiez, elle démissionnerait. Comme l'avait fait Nicolas Sarkozy, alors président par intérim du RPR, après le revers subi aux européennes de 1999 (12,82 %).

Même le maire de Meaux, Jean-François Copé, est sorti de sa réserve. Pour lui, «le rejet massif de nos dirigeants sur le terrain» crée «une situation intenable». Et de souligner que lui, mis en cause dans l'affaire Bygmalion, avait rendu son tablier le 27 mai 2014, il y a cinq ans jour pour jour. Quant à Geoffroy Didier, pourtant directeur de campagne de François-Xavier Bellamy et porte-parole de LR qui avait soutenu Wauquiez quand il briguait la tête du parti, il a estimé que «la droite devait se déringardiser d'urgence et abandonner son conservatisme sociétal. Cette droite-là ne nous fera jamais gagner, elle nous condamnera à l'échec».

«Voilà le résultat»

Le maintien ou non du président de la région Auvergne-Rhône-Alpes à la tête du parti de la rue de Vaugirard a saturé la réunion du bureau politique (BP) de LR, lundi en fin d’après midi. «On ne peut pas continuer comme ça. Surtout avec les municipales à l’horizon, s’inquiète un des candidats de la liste Bellamy, furax d’avoir raté son entrée au Parlement de Strasbourg. A partir du moment où François-Xavier Bellamy a réussi à faire naître une dynamique autour de 15 % dans les sondages, Laurent Wauquiez a voulu revenir sur le devant de la scène et voilà le résultat.»

Depuis l'arrivée de Wauquiez à la tête du parti, Valérie Pécresse avait soigneusement évité tous les bureaux politiques, mais elle se devait d'être présente lundi pour défendre sa ligne : un nécessaire élargissement pour reconquérir un électorat plus vaste. Et d'appeler à une «refondation», à l'instar du chef de file des sénateurs LR, Bruno Retailleau. Sur RTL, Pécresse a également cité FrançoisBaroin, Gérard Larcher ou Eric Woerth, «mais aussi tous ceux qui se sont un peu mis en retrait, tous ceux qui se sont mis dehors comme Xavier Bertrand. Tous ceux-là doivent se réunir». Pour ne pas se retrouver coincés, Gérard Larcher, Bruno Retailleau et l'ensemble des sénateurs n'ont pas assisté au BP. Ni curée, ni soutien implicite. «Ça va gueuler. Il va y avoir des critiques, sans doute quelques prises de bec, mais à l'arrivée, il ne risque pas de se faire virer», prédisait un membre du BP avant la réunion. «Avec lui, on a réussi à perdre le vote des seniors alors qu'ils ont été matraqués par M acron. Il faut quand même le faire», ironisait un proche de Pécresse.

Manger son chapeau

Dimanche soir, dès son discours post-résultats terminé, Laurent Wauquiez s’est enfermé dans son bureau pour entamer des consultations. Commençant par appeler Nicolas Sarkozy, dont l’influence reste majeure au sein de LR. Des discussions menées tous azimuts encore lundi matin. Plus que sa personnalité ou son mode de gouvernance jugé trop solitaire, c’est la stratégie choisie par Wauquiez depuis son arrivée à la tête du parti qui fait l’objet de toutes les critiques. Après la double claque de 2017, présidentielle et législative, la droite devait à ses yeux réaffirmer ses valeurs pour ramener à elle une partie de son électorat séduit par le FN. Ce qui revenait à occulter le fait qu’une partie de la clientèle LR avait succombé au discours réformateur du candidat Macron et qu’il aurait fallu s’en occuper.

«Aujourd’hui, le problème n’est pas tant celui du leadership que celui de la stratégie et des alliances, notamment avec le centre et le centre droit. On voit que LREM tout seul n’est pas en mesure de faire barrage au RN», constate un ancien collaborateur de Sarkozy à l’Elysée. Une question qui devient d’autant plus cruciale à l’approche des élections municipales où pour le coup, LR jouera vraiment sa survie. Dans plusieurs de ses bastions traditionnels du sud de la France ou dans des villes de l’Ouest, la liste LREM a littéralement balayé la droite dimanche. S’il ne veut pas voir des alliances locales entre LREM et LR se nouer dans son dos, Laurent Wauquiez n’a d’autres choix que de manger son chapeau et de tempérer son discours sur la «droite des valeurs». Lundi soir, il a proposé des «états généraux» du parti à la rentrée, afin de «tout remettre à plat».