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Libération
Éditorial

Attention à l’arrogance

publié le 5 juin 2019 à 21h16

Tout beau, tout vert ? Yannick Jadot, nouvel homme fort d'EE-LV depuis qu'il a réussi la performance de placer sa liste sur la troisième marche du podium lors du scrutin européen, pousse son avantage. Les feux sont au vert, il accélère. Normal. Son discours ? Il est à la conquête. Les écologistes ont vocation à prendre le pouvoir, claironne-t-il, les yeux déjà rivés sur 2020 (les municipales) et 2022 (la présidentielle). Le mandat que lui ont donné le 26 mai les électeurs, précise le député européen, n'est pas de regarder dans le rétroviseur et de négocier avec des formations de l'ancien monde en perte de vitesse, mais de surfer sur l'élan qui semble à l'œuvre au sein de la jeunesse française et européenne. «Nous ferons nos devoirs quand vous ferez les vôtres», disent à la classe politique les lycéens et les étudiants qui défilent chaque vendredi. Mon devoir, répond Yannick Jadot, est de construire cette force politique qui répond à ce désir d'écologie. Quitte à claquer le beignet aux formations de gauche qui frappent à sa porte ? Sans doute se rappelle-t-il qu'il n'y a pas si longtemps, lesdites formations de gauche se moquaient de l'écologie comme de leur première chemise. Attention néanmoins à l'arrogance. Jadot aura à un moment besoin des néo-écolos. 13 %, c'est bien. C'est un socle solide, pas encore une vague certaine de tout balayer sur son passage. L'histoire du parti écolo est suffisamment riche de succès aussitôt gâchés pour faire preuve de modestie. D'autant que la formation EE-LV reste embryonnaire. Et si des pans de la société semblent prendre conscience de l'urgence écologiste, le travail de conviction dans l'opinion n'est pas achevé. Le vrai écueil de la stratégie du Vert solitaire de Yannick Jadot : à trop snober la gauche, il lui sera difficile de se poser en rassembleur, une nécessité pour gagner.