La clope entre deux heures de cours est visiblement passée de mode. Si le collège et le lycée restent les périodes d'expérimentation des premiers verres d'alcool, les jeunes Français délaissent de plus en plus la cigarette. C'est ce que révèle l'enquête nationale dirigée par l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) en collège et en lycée chez les adolescents sur la santé et les substances (EnClass) menée de mars à juin 2018 auprès de plus de 20 000 collégiens et lycéens.
L'étude montre un recul généralisé des usages de tabac, prolongeant une tendance amorcée depuis plusieurs années chez les adolescents : en cinq ans, l'expérimentation du tabac a reculé de plus de 6 points chez les collégiens. Elle est passée de 27,8% en 2014 à 21,2% en 2018. Pour Stanislas Spilka, responsable du pôle Enquêtes et analyses statistiques à l'OFDT, «l'image rebelle du cow-boy Marlboro qui s'affirme par le tabac est dépassée et s'estompe de manière importante chez les adolescents». En quatre ans, l'expérimentation de la cigarette est passée de 60,9% à 53%.
Le cannabis en baisse
«Les années collèges correspondent pour l'essentiel à une phase de diffusion des substances licites qui se prolonge durant les années lycée, rappelle le responsable du pôle Enquête. C'est là qu'on consolide malheureusement les premières consommations. Avec des usages réguliers qui s'affirment et deviennent importants notamment pour l'alcool et le tabagisme plus tard.» De la même manière que pour le tabac, la consommation de cannabis chez les collégiens et lycéens est en baisse. Au collège, cela recule de quatre points, de 9,8% en 2014 à 6,7% l'an dernier.
Sa diffusion ne s'amorce qu'en classe de quatrième, avec environ 7,7% des adolescents qui disent en avoir déjà pris. Ce chiffre double en classe de troisième pour atteindre les 16,1% d'élèves. Au lycée, elle chute de près de 11 points, passant de 44 à 33,1%. Toutefois, l'usage régulier, correspondant au moins à dix prises dans le mois, reste stable pour les lycéens : environ 6,8% des terminales en consomment régulièrement.
«Vers une évolution des politiques publiques»
Selon Jean-Pierre Couteron, psychologue clinicien et porte-parole de la fédération Addiction, «cette enquête permet de constater que les années collèges et lycées sont bien le cœur de cible sur lequel nous devons porter notre vigilance. C'est là que se font les expérimentations, qui pour une partie, vont se transformer en usage régulier». L'auteur de Adolescents et Cannabis, que faire ? (éd. Dunod) rappelle toutefois le haut niveau d'usage du cannabis chez les jeunes. «Ce qui a marché dans la prévention, c'est le contact avec les familles. Ce qui ne fonctionne pas, c'est la réponse sociale. Il faut arrêter ce jeu du gendarme et du voleur et aller vers une évolution des politiques publiques, comme le font les autres pays. Le cannabis est un produit dangereux chez les jeunes, avec des risques cognitifs et psychiatriques réels.»