Malgré les beaux discours anti-gaspi, le gouvernement continue de prendre l’écologie par le petit bout de la touillette. Selon nos informations, Bercy est à la manœuvre pour repousser d’un an l’interdiction des ustensiles plastiques à usage unique, de 2020 à 2021. Mais pour garder les mains propres, il a tenté un tour de passe-passe : faire porter par les députés LREM l’annulation d’un amendement que la majorité avait porté dans la loi sur l’agriculture et l’alimentation en 2018 .
Il s'agissait alors de gagner un an sur la directive européenne interdisant en 2021 ces couverts, pailles et autres gobelets jetables et d'appliquer cette mesure dès le 1er janvier 2020 en France. Le projet de loi Pacte était revenu sur cette ambition, via un amendement au Sénat repassant à 2021, amendement qui avait survécu à l'Assemblée, sous la pression insistante du gouvernement. Mais ce report avait été retoqué par le Conseil constitutionnel en mai au motif qu'il s'agissait d'un «cavalier législatif», un morceau de texte qui n'avait rien à voir avec son objet principal. Pas de quoi décourager l'exécutif, qui brandit à chaque fois un argument massue : 2 000 emplois seraient menacés par cette interdiction, selon des données régulièrement avancées par Bercy.
La secrétaire d'Etat chargée de l'Industrie, Agnès Pannier-Runacher, a tenté de faire porter ce report par la majorité. Problème : les députés LREM des deux commissions concernées, celles des affaires économiques et du développement durable, ne sont pas prêts à jouer les godillots sur ce coup-là. «Le groupe a signifié qu'il n'en voulait pas», résume un membre de la commission des affaires économiques. Un tête-à-queue flagrant au moment où l'exécutif poursuit son verdissement de façade en vendant le projet de loi «anti-gaspillage» porté par Brune Poirson.
«Le sujet a été évoqué en réunion du bureau du groupe. Ça a gueulé, précise un participant. Le gouvernement va galérer à trouver une majorité sur le sujet.» Ce que les députés macronistes craignent par-dessus tout, c'est de devoir endosser la responsabilité d'un nouveau recul gouvernemental en matière d'écologie. «Il n'est pas question de revivre l'épisode glyphosate», prévient un parlementaire LREM.