A Paris, la rue La Fayette, artère automobile par excellence, est pénible en ce mercredi caniculaire. Dans la cour de l’école du 216 bis, en revanche, le climat est délicieux. Sous les feuilles d’un ginkgo-biloba en fleurs, une rareté, et dans un agréable petit vent, Anne Hidalgo annonce un plan d’installation de 150 capteurs de la qualité de l’air dans les écoles et les crèches.
A ses côtés, le milliardaire Michael Bloomberg, ancien maire de New York et grand activiste de la lutte pour le climat, a tombé la veste mais gardé la cravate. «Nous sommes fin juin et c'est la première fois que j'ai chaud, remarque-t-il. A New York, il fait froid, on ne peut pas sortir sans mettre un pull. Je suis sûr que les gens vont vous reprocher la chaleur comme ils me reprochaient la neige quand j'étais maire.» Parole d'ex-confrère.
Attelage. Le héros du jour est un microcapteur, élaboré par une firme californienne, posé sur l'auvent de la cour. Pour agir, «il faut partir de ce que la technologie nous permet de faire», résume la maire. Michael Bloomberg ajoute : «Ce que vous pouvez mesurer, vous pouvez le gérer.» C'est la philosophie de Bloomberg Philanthropies. L'homme qui a inventé la plateforme d'informations financières la plus complète du monde sait de quoi il parle.
La pollution a-t-elle à voir avec l'historique du cours d'une action ? «En 2007, raconte l'ancien maire de New York, nous avons mesuré la pollution avec des systèmes bien moins perfectionnés. Et nos données nous ont montré que la source principale n'était pas la circulation automobile. C'était les bâtiments.» A Paris, Anne Hidalgo veut «avec ces capteurs, poser les bases d'une connaissance claire de ce qui nous arrive». Karine Léger, directrice générale d'Airparif, complète : «Nous avons un dispositif unique au monde par son expérience de quarante ans et par le regroupement de l'Etat, des collectivités, des acteurs économiques et des associations. Notre enjeu, c'est de rester leaders dans ce domaine grâce à l'appui de Bloomberg.»
Anne Hidalgo a gagné ses galons à l'international en réunissant un sommet de 1 000 maires à l'hôtel de ville, parallèlement à la COP 21 de 2015. L'année suivante, elle est élue présidente du C40, un réseau de 94 grandes villes du monde. Première femme à ce poste, réélue en 2018, elle a évidemment bénéficié du soutien actif de Bloomberg. L'attelage entre un milliardaire républicain puis démocrate puis indépendant et une ancienne inspectrice du travail française et socialiste peut paraître baroque, mais les deux mettent en avant avec constance leur engagement commun.
Hors-sol. Toutefois, un peu hors-sol par rapport aux débats locaux sur les voitures, les vélos et les travaux partout, Bloomberg a dit : «Je pense que les habitants de Paris devraient vous remercier pour ce que vous faites dans cette ville.» A huit mois des municipales, la maire de Paris souhaite sans doute davantage être réélue que remerciée.